PLAINTE OU DÉNONCIATION DE KABILA Confusion Matata se défend, Paluku dément, le PGR ajoute à la polémique et Mende divague

Lundi 6 juillet 2015 - 14:40

Le Rapport Luzolo publié par C-NEWS, dans son édition du lundi passé, a provoqué un véritable séisme politique en RD-Congo. Nos sources juchées dans les hautes sphères du pouvoir ont promis à notre Rédaction d’autres documents qui disent-elles sont encore « compromettant pour plusieurs bonzes du régime». Pour revenir aux fuites du Rapport Luzolo, celles-ci ont provoqué une cascade des réactions de plus hautes autorités politico-administratives. Le premier à avoir réagi fut le patron de la puissance publique, Flory Kabange Numbi, le procureur général de la République (PGR).

Face à la clameur publique suscitée par les fuites du Rapport Luzolo, le PGR a été appelé en sapeur-pompier pour éteindre le feu dans la Kabilie. Sans convaincre, le PGR s’est efforcé à nuancer la notion de « plainte » de celle de « dénonciation ». Pour lui, le travail du Conseiller du chef de l’Etat en matière de lutte contre la corruption, Luzolo Bambi, constitue une dénonciation et non une plainte. Une plainte étant le fruit d’une enquête par le Parquet, alors que la dénonciation ne l’est pas. En voulant minimiser le Rapport Luzolo pour calmer le camp présidentiel en ébullition, le PGR n’a pas réussi à convaincre les personnes avisées qui lui oppose que le travail de Luzolo est tellement documenté qu’il a été nécessairement précédé par un travail d’analyse et de tri. Une sorte d’enquête ou du moins de pré-enquête.

Car sinon, l’ancien ministre de la Justice Luzolo ne serait al¬ors qu’un simple colporteur des ragots. Or sa note tech¬nique en appui à sa lettre de transmission pour fait de corruption au PGR montre bien qu’un travail a été bel et bien fait en amont. Ce n’est pas une enquête classique mais c’est une enquête quand même. En effet, sa note technique comporte des faits et fait allusion aux dispositions légales violées. Le PGR a beau mettre les gens en garde en évoquant le principe de présomption, personne ne le prend au sérieux car ses Parquets se moquent tous les jours de ce principe. Pour ses magistrats, c’est la présomption de culpabilité.

Tous les faibles que la police présente à la télévision comme des coupables avant une décision de Justice définitive, le PGR a-t-il déjà poursuivi un officier de police pour violation du principe de pré¬somption d’innocence ? Par sa prise de parole politique maladroitement habillée comme technique, le PGR s’est trahi en volant au sec¬ours des personnalités visées par la dénonciation. Et d’ailleurs le travail de Luzolo, est en tout point de vue, un cinglant désaveu pour lui et ses offices de répression. Car s’il faisait bien son job en poursuivant les truands, les vrais malfaiteurs en col blanc qui pillent les deniers publics, on aurait pas créer le poste de Conseiller du chef de l’Etat en matière de lutte contre la corruption. « Fini la récréation », « les portes de la prison seront ouvertes » notamment sont restés de slogans creux dans un pays où la corruption est endémique et systémique car les politiciens ont organ¬isé l’opacité sur les avoirs en la consacrant dans la constitution. Au lieu de menacer les gens pour violation de la présomption d’innocence, le pasteur procureur Flory Ka¬bange ferait mieux de mon¬trer ses preuves en arrêtant les criminels en col blanc. Lui qui est curieusement les yeux et les oreilles de l’Etat ne voit rien et n’entend rien. Et quand les autres voient et entendent à sa place, il s’offusque. Après le PGR, le jour suivant, soit le vendredi 3 juillet, deux autres auto¬rités ont réagi presque au même moment sur le même sujet. Le premier ministre Augustin Matata Ponyo dont la marque de fabrique est la bonne gouvernance, depuis le ministère des finances (2009), ne pouvait ne pas réagir. Le chef du gouverne¬ment tout en appuyant la démarche de la Justice, il ne pouvait en être autrement, a démontré quelques erreurs dans le Rapport Luzolo.

C’est notamment le cas de l’achat des bus Transco qui, se défend-t-il, n’ont pas fait l’objet d’un marché de gré à gré. Il a aussi redit son at¬tachement à la présomption d’innocence. La Commu¬nication de trop a été faite par Mende, le porte-parole du gouvernement. C’est à se demander pourquoi a-t-il pris la parole alors que son chef devait s’exprimer le même jour que lui. Est-il vraiment le porte-parole du gouvernement où son pro¬pre porte-parole ?C’est du Mende tout fait. L’excès !Il faut qu’il en rajoute. Mon¬trer à Kabila que c’est lui le plus zélé, le plus fidèle serviteur. Et comme il faut s’attendre avec Mende, il a trafiqué l’Histoire sur la limitation des mandats pré¬sidentiels aux USA (là n’est pas le sujet). Bref, Mende a aussi parlé, revenant à peu près sur ce qu’avait dit le PGR.

Julien Paluku, gouver¬neur du Nord-Kivu, lui avait dit, sans convaincre, qu’il s’agissait –parlant des fuites de la dénonciation présiden¬tielle-, « d’une rumeur » au sortir d’une audience avec Kabila. Sauf qu’une rumeur peut s’avérer (vraie) sur¬tout dans un pays où la ré¬tention de l’info est érigée en règle. La vérité est que les fuites du Rapport Luzolo que C-NEWS a mises sur la place publique a ébranlé la Kabilie.

L’action qui selon certaines sources était ori¬entée d’abord contre le gou¬verneur du Katanga Moïse Katumbi, a été élargie pour lui conférer une certaine im¬partialité et inclusivité pour qu’on ne se douta pas qu’il est question d’une vendetta politique. Les naïfs avait cru que Kabila allait nettoyer les écuries. En a-t-il vraiment la volonté ? Pourra-t-il aller jusqu’au bout ? Tout son système ne s’écroulerait-il pas ? En tous les cas, dans la Majorité présidentielle, c’est la méfiance totale. Plus personne ne fait confiance à personne. Restaurer la confiance dans cette famille politique après les fuites du Rapport Luzolo relève dé¬sormais d’une gageure.

MTN