A la lisière de l’Ouganda sur la frontière d’Ishasa, le groupement de Binza, avec son potentiel agro-économique, demeure pourtant pauvre. Et les groupes armés y sont toujours présents obstruant les rares initiatives des populations. Une population attachée au retour de son chef, seul salut pour son développement.
En quittant la cité de Kiwanja (4km du chef-lieu du territoire de Rutshuru) en route vers le poste frontalier d’Ishasha, la diversité socio-économique et agropastorale contraste avec l’extrême pauvreté qui menace le Binza. Depuis plus d’une décennie, la contrée est quasi oubliée des autorités. Ecoles, centres de santé, bâtiments administratifs,…ces infrastructures pourtant indispensables pour le développement, ont tout perdu de leur beauté.
Elles datent des plus de 30 ans, pour la plupart explique Mugisha, un natif de Kisharo, le chef-lieu du groupement de Binza. La succession des régimes n’a eu presqu’aucune incidence sur le développement de ce groupement voisin aussi du parc des Virunga.
Des politiciens tireurs des ficelles
‘’ Il n’y a personne pour mener à bien les différents et éventuels projets de développement’’, reconnaît l’un des responsables locaux de la société civile faisant allusion à l’absence de l’autorité coutumière légitime. ‘’ Des ong sont venus, des bailleurs des fonds dans divers secteurs aussi, mais tous n’ont eu un interlocuteur valable enfin d’asseoir leurs activités’’, regrette, Ignace, un ancien agent d’une organisation internationale, qui a fermé ses portes six mois après une tentative ratée d’amorce des projets de développement.
Voisin du parc, qui l’entoure presque, le groupement de Binza, fait aussi l’objet d’une insécurité croissante. L’arrivée massive des réfugiers rwandais en 1994, y a beaucoup contribué. Avec la guerre de l’AFDL appuyé par l’armée rwandaise, des combattants Fdlr ont pris leurs quartiers dans le parc des Virunga, certaines localités de Binza notamment. Les guerres du Cndp d’abord, et du M23 en suite, et la naissance des groupes armés Nyatura, ont envenimé la situation. Au point de briser la cohésion sociale entre des communautés.
Certains politiciens, parmi les plus médiatisés du territoire de Rutshuru, serait parmi les tireurs de ficelles, avait révélé en 2014, plusieurs rapports d’ong dont Crisis group. ‘’ Ce sont eux, d’ailleurs qui mettent toute leur intelligence empêchant le rétablissement de l’autorité coutumière légitime dans ce groupement’’, avait reconnu un des membres de la commission provinciale d’arbitrage des conflits coutumiers, de passage fin novembre à Rutshuru. ‘’Nous savons bien qui est le chef légitime (Kadogo Bikamiro Amisi) mais les conditions sécuritaires nous empêchent pour l’instant de mettre fin aux querelles à la tête de ce groupement’’, reconnaît un autre notable.
Le vrai chef…espoir de développement
Le vrai chef, se serait le Mwami Kadogo. Ce vieux connu pour son patriotisme et son attachement à sa population a pourtant fait le frais des menaces. Alors que la commission d’arbitrage des conflits coutumiers travaillait au bureau du territoire, des centaines de jeunes ont été mobilisés enfin de barrer tout passage à celui que le Binza attend pour son décollage socio-économique. C’était un coup monté par ses détracteurs, certains notables concurrents, nous avouera plutard un des jeunes mobilisés.
De la ligné royale de Binza, Amisi Kadogo Bikamiro, bénéficie pourtant du soutien de la famille royale et des gardiens de coutume. Appuyer par toute la notabilité de Kisharo en passant par Nyamilima, Ishasha,…ce mwami investi officiellement par son arrêté de reconnaissance du ministère de l’intérieur, n’a jamais eu le beau temps de s’installer dans le palais royal de Kisharo.
Pour cause, la route menant à son groupement est toujours infestée par ses adversaires. Prêts à tout, même sa mort renseigne des nombreuses sources. Des protagonistes bénéficieraient même d’une main politico-sécuritaire latente mais dénoncée par la population. Des hommes et des femmes, dont l’espoir de tout développement passerait par le retour de celui qu’ils considèrent à leurs yeux comme le véritable chef de groupement.
Pour cela, il faudra d’abord, permettre à la commission d’arbitrage en appui au ministère de la décentralisation et affaires coutumières, visiblement décidé à mettre fin à ce conflits qui a trop duré, a remplir fidèlement sa mission. Si non, le Binza sans chef, serait condamné à un sous développement à grande vitesse.
Anéantissant même les rares et louables efforts consentis par sa dynamique population qui a même promis de faciliter l’acheminement du Mwami Kadogo Bikamiro, jusqu’à Kisharo, une fois que le ministère de tutelle aura levé le voile. ‘’C’est lui notre Mwami, la population est prête à lui assurer le nécessaire, le transport compris, pour qu’il s’installe dans son fauteuil’’, promettait un notable présent à la réunion de la commission à Rutshuru en novembre dernier.
Patient Ndoole