S’EXPRIMANT A L’OCCASION DE LA REMISE DE LA PRIME D’EXCELLENCE EDITION 2015 PGR F. KABANGE : "LA MAGISTRATURE EST ET DOIT DEMEURER UN CORPS D’ÉLITE…"

Lundi 11 janvier 2016 - 05:32
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En réponse au patron du Parquet général de la République : « Cette récompense nous appelle à nous remettre en question chaque jour pour justifier le choix porté sur nous », a reconnu un des lauréats.

Des magistrats vertueux, la RDC n’en manque pas. Samedi 9 janvier, au Congo Fleuve Hôtel à Kinshasa, une quarantaine de magistrats du parquet ont été gratifiés d’une prime d’excellence. Ils ont reçu chacun, du président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, un ordinateur portable et un kit constitué de plusieurs instruments juridiques.

Le Procureur Général de la République, Flory Kabange Numbi a expliqué à l’assistance que " la prime d’excellence vise à récompenser les magistrats les plus méritants du pays qui, dans l’exercice de leurs fonctions, ont fait montre de la compétence remarquable et avérée, d’honneur et de dignité ainsi que d’abnégation en 2015. " Ce, au terme d’un critérium qui se voulait à la fois rigoureux et objectif. Les membres du jury ne se connaissaient pas entre eux. Le PGR Flory Kabange a refusé d’être juge et partie, et a plutôt confié ce travail à des observateurs indépendants. Notamment les gouverneurs de provinces, des avocats, des membres de la Société civile et agents des services de sécurité.
S’adressant aux lauréats, le premier magistrat du Ministère public les a exhortés en ces termes : " Cette distinction exige que vous puissiez davantage œuvrer pour le mériter encore à l’avenir. Soyez donc ces mobilisateurs honnêtes, dignes et crédibles, pleins d’amour et mettez en œuvre les principes appris pour une justice impartiale et équitable afin que vous puissiez grandir et aider vos collègues à croître aussi dans le même élan et sur fond de sagesse".
Un des récipiendaires, le procureur général près la Cour d’appel de Kinshasa Matete, Pungwe Nemba, a répondu au Procureur général de la République qu’en leur décernant les prix d’excellence pour l’année 2015, il a voulu adresser à tous les magistrats du Ministère public un double message : une interpellation et une invitation.
" Cette récompense est une interpellation en ce sens que ce prix nous appelle à nous remettre en question chaque jour pour justifier le choix porté sur nous, et ensuite, pour les autres magistrats à améliorer la qualité de leur travail et leur comportement pour mériter un jour la prime d’excellence. C’est aussi une invitation à faire mieux pour mériter plus non seulement de notre hiérarchie, mais aussi de la nation congolaise toute entière ", s’est exprimé Pungwe.
Le Procureur général près la Cour d’appel de Kinshasa Matete a émis le vœu de voir chacun des magistrats intérioriser et vivre au quotidien l’essence de la justice : rendre celle-ci en toute égalité, impartialité, intégrité et équité. " Nous devons nous oublier nous-mêmes, disparaitre derrière une fonction infiniment plus digne et nous rappeler notre condition de mortel qui usurpe une fonction qui n’appartient qu’à Dieu. Nous devons être dotés des qualités intellectuelles et morales nous permettant d’être non pas serviteurs de gens mais de la loi ".
En instituant la Prime d’excellence, le PGR Flory Kabange Numbi n’attend pas de magistrats du Ministère public autre chose que d’être au total service de la loi. Pour lui, " la magistrature est et doit demeurer un corps d’élite, un vivier où sont formées des personnes spéciales, s’extirpant des sentiers battus et des lieux communs. Des agents de développement et de progrès tendus résolument vers un idéal de perfection. " C’est ici qu’il faut saluer l’innovation du PGR d’introduire un mode de cotation qui rassure les magistrats vertueux et qui stimule les autres à bien faire, car leur rendement ne sera pas oublié.
La cérémonie du 9 janvier était la deuxième édition de la prime d’excellence aux magistrats les plus méritants du Ministère public. La première a eu lieu en octobre 2014, en marge des assises de l’Assemblée générale des procureurs d’Afrique, APA. Lire ci-dessous, l’adresse du PGR à l’occasion de la remise de prime d’excellence, édition 2015. Didier KEBONGO

Discours du PGR à l’occasion de la remise de prime d’excellence édition 2015

Honorable président de l’Assemblée nationale,
Je voudrais vous prier de bien vouloir être notre fidèle interprète au près de Son Excellence Monsieur le Président de la République, Chef de l’Etat pour lui transmettre mes vifs et sincères remerciements et lui exprimer ma profonde gratitude pour sa constante préoccupation liée au bon fonctionnement de l’appareil judiciaire dans notre pays et sa confiance jamais démentie et régulièrement renouvelée à l’endroit de ses animateurs.
En ce jour de grande solennité, permettez-moi honorable président de l’Assemblée nationale, de vous exprimer notre joie et notre satisfaction au moment de saluer votre présence significative à cette cérémonie. Vous faites ainsi honneur au pouvoir judiciaire en général et au Parquet général de la République en particulier. Cette présence donne la mesure de la responsabilité sublime qui est la nôtre afin de nous stimuler davantage dans l’accomplissement de notre mission hautement républicaine avec honneur, dignité et abnégation. Veuillez recevoir ici, honorable président de l’Assemblée nationale, l’expression de la gratitude de tous les magistrats du ministère public.
Je serais ingrat si je n’exprimais ma reconnaissance au gouvernement de la République que dirige son Excellence Matata Ponyo Augustin, Premier ministre, pour avoir permis la tenue de cette cérémonie en mettant à notre disposition des fonds nécessaires.
Mesdames et messieurs, distingués invités,
Ma reconnaissance s’exprime également à votre intention à tous dont la présence en cette circonstance revêt un cachet tout particulier et en constitue la marque de votre volonté d’accompagnement du corps de la magistrature dans ses efforts en vue de mériter davantage de la patrie. Elle est le signe de votre foi inébranlable en la capacité de la justice en tant que bras séculier de la République d’apporter sa contribution indispensable et déterminante dans la politique de la Révolution de la Modernité telle que prônée par le Président de la République, chef de l’Etat.
En date du 24 octobre 2014, à l’occasion de la clôture des assises de la 9ème session de l’Assemblée générale de l’Association des procureurs d’Afrique, APA, dans ce même cadre, une cérémonie analogue était venue se greffer. L’expérience s’étant avérée concluante et satisfaisante, j’ai pris la résolution de la perpétuer pour en faire une tradition annuelle, en ligne droite de l’idée qui a germé quelques années.
Cette initiative, il convient de le rappeler, vise à récompenser certains magistrats du parquet parmi les plus méritants qui dans l’exercice de leurs fonctions ont fait montre de la compétence remarquable et avérée, d’honneur et de dignité ainsi que d’abnégation.
En effet, l’opinion publique, en fustigeant globalement le mauvais fonctionnement de la justice, occulte le leadership incontestable de certains magistrats consciencieux. Il s’agit également de susciter et de favoriser une saine émulation dans ce corps.
Ainsi que j’ai eu à le dire précédemment, les magistrats désignés comme modèles dans leurs prestations professionnelles, ont été retenus par un jury anonyme, indépendant et objectif composé notamment des gouverneurs de provinces, des avocats, des membres de la société civile et des services de sécurité.
Des voix fusent régulièrement au sein de notre société, quelque fois même avec bruit, pour dénoncer la corruption, la concussion, la lenteur, le clientélisme, le trafic d’influence, l’instrumentalisation et d’autres maux qui gangrènent le système judiciaire dans notre pays entravant ainsi la bonne administration de la justice. La population très exigeante qui exprime alors avec véhémence et juge avec sévérité l’action de ceux là que la collectivité et l’Etat ont désigné pour assurer la régulation de la vie sociale. Cette virulence dans la critique trouve son fondement dans les actes et opinion que se fait notre population de la justice en tant que dernier rempart de l’Etat, le bouclier de la République dans tout système démocratique. La justice doit se placer à l’avant-garde du processus de progrès de la nation et ne peut se permettre de clopiner une opinion péniblement dans le dernier rang d’une société qui veut et se doit de se mouvoir dans le sens de l’émergence d’un nouvel espoir en l’avenir …
Une justice plombée par des scandales à répétition n’a pas de place ni d’avenir en République Démocratique du Congo, notre cher et beau pays, qui a pris l’option de refus catégorique d’être une nation pour ces délits.
Dans la perspective d’une justice définitivement acquise au changement, et susceptible de dissiper tous les doutes qui persistent au sein de la population quant à sa capacité de répondre quant à ses attentes légitimes, la République peut, fort heureusement compter sur bien des magistrats qui, malgré les conditions de vie et de travail difficiles, s’emploient à remplir au quotidien les devoirs de leur Etat dans la correction totale et dans le strict respect de leur serment statutaire. Ceux de nos collègues qui seront primés tout à l’heure, appartiennent à cette race de combattants de l’honneur et de la dignité.
Je martèle que la magistrature est et doit demeurer un corps d’élite, c’est-à-dire un vivier où sont formées des personnes spéciales. Des personnes spéciales sortant de l’ordinaire, s’extirpant des sentiers battus et des lieux communs. Des agents de développement et de progrès tendus résolument vers un idéal de perfection. Le magistrat a vocation d’être une lumière et une référence dans la société. Il a une valeur mystique dans la collectivité et il joue un rôle catalyseur. Les faiblesses qui peuvent paraitre humaines et donc acceptables et justifiables pour les autres, ne sont tolérées d’aucune manière lorsqu’il s’agit du magistrat. Ceci traduit à suffisance la place qu’il occupe dans la société et qu’il doit s’employer à maintenir pour sa propre crédibilité mais aussi et surtout pour l’institution qu’il représente et incarne.
Honorable président de l’Assemblée nationale, Vous allez bientôt procéder à la remise des prix aux lauréats. Il va s’agir d’un moment fort de haut témoignage de reconnaissance de la République pour le travail bien fait. Lorsqu’ils recevront leurs récompenses, chacun d’eux vivra cet événement avec un instant de fierté absolue, qui restera gravé à jamais dans son cursus personnel. Ce sera l’occasion d’une prise de conscience de leur nouveau statut de leaders. Des leaders pour conduire et entraîner les autres, mais aussi les éclairer par rapport à leur position de luminosité.
Quant à vous chers collègues lauréats, je voudrais saisir cette opportunité pour vous adresser mes chaleureuses félicitations et vous exhorter de continuer sur cette voie et même de faire davantage afin que les espoirs que vous avez suscités ne soient jamais déçus.
Soyez fiers de la reconnaissance de toute une nation. Vous avez assurément mérité de la patrie. Demeurez donc résolument engagés à maintenir le cap. En effet, la vertu est un combat de tous les jours et un engagement de tous les instants. Prenez conscience de la hauteur de vos responsabilités par le statut qui vous est conféré et reconnu aujourd’hui, pour votre plein épanouissement où le bonheur de vos familles et proches et également pour le prestige de la sécurité de l’Etat et du peuple congolais.
Cette distinction exige que vous puissiez davantage œuvrer pour le mériter encore à l’avenir, en recherchant toujours le meilleur.
Ainsi, comme j’ai eu à le dire, lors de la cérémonie d’octobre de l’année 2014, soyez donc ces mobilisateurs honnêtes, dignes et crédibles, pleins d’amour, qui mettent en œuvre les principes appris pour une justice impartiale et équitable, afin que vous puissiez vous-mêmes grandir et aider les autres, c’est-à-dire vos collègues à croître aussi dans le même élan d’intégrité sur fond de sagesse.
Que ce moment enfin soit vécu par les autres collègues comme un appel à redoubler d’effort car la soif de l’Excellence grandit l’homme tandis que la complaisance dans la médiocrité l’avilit. Il va de soi que l’échantillon de lauréats retenus a été constitué à titre indicatif. Certains autres méritent d’avoir leur place au soleil, ils le savent, et je ne l’ignore pas non plus. A ceux là, je voudrais tout simplement dire que les âmes bien nées ne relâchent jamais dans leur travail.
Distingués invités, Mesdames et messieurs,
Je vous réitère mes remerciements pour votre présence combien réconfortante tout en implorant la grâce de notre Dieu pour qu’elle puisse accompagner la justice congolaise et ses opérateurs, dans les sentiers sécurisants de la droiture, de la fidélité, de l’engagement et de l’honneur.
Je vous remercie.
Flory KABANGE NUMBI
Procureur Général de la République