La RDC devrait rapatrier son lion en errance dans un parc au Gabon

Lundi 16 mars 2015 - 09:16

Un lion au Gabon ! C’est un évènement parce que la dernière fois que le roi de la forêt a été aperçu dans ce pays date de 1996. Et ce fut une femelle. Selon toute vraisemblance, ce fauve serait venu de la RDC.

Cette information ne vient pas de l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) encore moins du ministère de l’Environnement, mais plutôt de l’ONG Panthera opérant au Gabon. Pour les environnementalistes congolais, membres de l’Association nationale des environnementalistes au Congo (ANEC) le rapatriement de ce lion s’impose, s’il s’avère qu’il est « congolais ».

Matata II invité à rapatrier le lion « congolais »

L’ANEC lance un cri d’alarme au gouvernement Matata II pour qu’il s’implique pleinement dans le rapatriement du lion aperçu dans le Parc national des plateaux des Bateke au Sud-est du Gabon, à la frontière avec le Congo-Brazzaville.

Selon l’agence Reuters qui a livré cette information, le fauve a été filmé à trois reprises depuis janvier 2015 par les caméras de l’ONG Panthera. En fait, c’était en 1996 qu’on avait aperçu pour la dernière fois un lion au Gabon. Ce fut une femelle. Ce qui laisse penser à certains experts que ce lion serait venu de la RDC, plus précisément du Katanga.

« Au départ, je n’arrivais pas à le croire… Et puis, je me suis rendu sur place poser d’autres caméras dans l’espoir qu’il y ait d’autres lions », a déclaré le docteur PhilippHenschel, coordonnateur d’un programme de recensement des lions pour l’ONG Panthéra, à Reuters.

A en croire cet expert, le fauve « pourrait venir de la RDC après avoir traversé le fleuve Congo ».

« L’ANEC souhaite que le lion aperçu au Gabon soit rapatrié dans le cas où, après indentification de l’animal, il proviendrait de la RDC », a déclaré pour sa part Jean Lambert Ebwasa, président de l’ANEC.

De son point de vue, « dès lors que cette information a été livrée, le gouvernement, par le truchement du ministère de l’Environnement et Développement durable, doit enclencher toutes les démarches aux fins de l’indentification de l’animal et, le cas échéant, son rapatriement dans son biotope naturel qui  serait la RDC ».

En effet, il n’est pas étonnant que des animaux emblématiques de la faune congolaise migrent vers les pays frontaliers de la RDC. Plusieurs gorilles des montagnes du Parc national des Virunga ont migré vers le Rwanda voisin et l’Ouganda.

Kinshasa ne s’est jamais empressé d’arrêter ce phénomène de dépeuplement des espèces animales dû notamment à la permanence des conflits armés dans la région. Mais aussi, et plusieurs rapports des agences des Nations Unies ou des ONG indépendantes l’ont noté, les conflits armés que la RDC connait dans sa partie orientale sont en fait des guerres de prédation des ressources naturelles dont fait partie les animaux endémiques. Ceux-ci font aujourd’hui entrer des millions de dollars au Rwanda et en Ouganda.

Selon les experts, l’itinéraire ce lion pourrait partir du Katanga via l’Angola  en passant par le Congo-Brazzaville pour se retrouver dans la brousse gabonaise aujourd’hui.

La région katangaise a été victime, ces dernières années, des conflits armés menés notamment par le Bakata-Katanga, une rébellion qui écume les savanes boisées de la province cuprifère. Les détonations d’armes lourdes non seulement peuvent traumatiser les animaux mais aussi les faire fuir une zone.

Déficit de la gestion des parcs nationaux

D’autres causes de cette migration des animaux de la RDC vers d’autres pays seraient liées au déséquilibre écologique. Selon l’environnementaliste FranckyKongambulu, Secrétaire rapporteur de l’Anec, « quand la niche écologique est rompue, l’animal cherche forcément un biotope clément qui lui permettrait de bien s’alimenter ».

A l’en croire, « la déforestation, le feu de brousse, l’agriculture itinérante sur brûlis peuvent rompre l’équilibre prédateur-proie ».

Et donc, quand le prédateur ne trouve plus de proie, il va migrer vers des paysages favorables à sa survie. Ça serait le cas de ce lion qui se trouve aujourd’hui en errance solitaire dans un pays où l’on ne croyait plus en percevoir. En fait, toutes les études les démontrent, l’érosion de la biodiversité en RDC découle de la pauvreté des populations.

La récente apparition de ce lion est un évènement au Gabon au point que l’on s’apprêterait à le baptiser « Ali », du nom du Président gabonais Ali Bongo, selon l’agence Reuters. On se souviendra que le père de l’actuel chef de l’Etat, Omar Bongo, avait un tigre comme animal de compagnie.

Pendant que les Gabonais cherchent à baptiser un lion dont ils sont sûrs qu’il n’est pas le leur, les dirigeants congolais sont restés muets par rapport à cette information. Aucune déclaration n’a été faite ni par le ministère de l’Environnement, ni par l’Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN).

Si les institutions en charge de la conservation en RDC travaillaient normalement, ce sont elles qui devraient signaler la disparition d’un lion des parcs congolais. Cette situation illustre non seulement l’absence d’inventaires, même des espèces endémiques, mais aussi le déficit de gestion des aires protégées, où pullulent plusieurs ONG dont le rendement sur terrain reste mitigé.

Raison pour laquelle, l’Anec appelle le gouvernement congolais à prendre ses responsabilités pour entrer en contact avec les autorités gabonaises afin d’identifier le fauve. Les experts de la Direction de la chasse du ministère de l’Environnement connaissent toutes les espèces de lions de la RDC. Ils pourront déterminés s’il fait partie du patrimoine faunique congolais. Le pays a besoin de cet animal qui est en voie de disparition.

C’est depuis plusieurs années que le Jardin zoologique de Kinshasa n’a plus de lion. Il en est de même de la quasi-totalité des zoos à travers le pays.

En outre, les environnementalistes de l’ANEC en appellentà l’Union internationale pour la conservation de la Nature (UICN) et à l’UNESCO, dans le cadre de son programme de coordination internationale des réserves de biosphères  MAB (Men and Biospher), de s’impliquer dans la démarche d’identification et de rapatriement éventuel de ce fauve.