Berceau de la traçabilité des 3 T en RDC, la province du Tanganyika fait l’expérience d’une fraude depuis 3 ans avec le foisonnement des comptoirs et des négociants clandestins dont les activités se font en marge des lignes directrices du Guide de l’OCDE sur le Devoir de diligence. Le Gouverneur de cette province, ainsi que le Ministre des Mines du Gouvernement central, sont appelés à ouvrir l’œil afin de préserver les populations locales et l’Etat des répercussions négatives qui en résultent. Aussiles consommateurs finaux doivent-ils se méfier des produits fournis par des comptoirs et des négociants qui n’ont pas de concessions connues ni des contrats en bonne et due forme avec des coopératives agréées.
Les minerais des 3 T du Tanganyika extraits principalement des sites de Kisengo et de Maibaridi, dans l’ex-Katanga, sont réputés pour leur bonne composition centésimale. Ils sont ainsi prisés par les exploitants installés dans des provinces voisines, principalement au Sud-Kivu, qui préfèrent les mélanger à ceux extraits localement ou ailleurs afin d’avoir un produit de meilleure qualité, donc d’une bonne teneur, dont le marché international est avide. De ce fait, il s’observe depuis quelques 3 ans au Tanganyika un afflux des comptoirs, voire des négociants clandestins, qui s’activent en toute illégalité dans le négoce desdits minerais, donc en marge des lignes directrices du Guide de l’OCDE sur le Devoir de diligence. En ce que, notamment, ceux-ci n’ont pas de concessions connues ni de contrats avec les coopératives agréées. C’est le cas, par exemple, du comptoir Congo Jacxin (CJX). Ils ont profité de l’arrêt de Kisengo Mining qui possède une usine de transformation sur place il y a près de 4 ans à la suite de l’effondrement des cours sur le marché international pour faire envahir ses concessions par des creuseurs marginaux devenusleurs fournisseurs. Et pour contourner la donne «origine des minerais» qui entre en ligne de compte dans la traçabilité, ils s’illustrent dans le trafic des étiquètes. Sûrement avec la complicité de certains services attitrés de la province. Sans des charges évidentes d’exploitation, ils jouent ainsi avec les prix. Ce qui accentuerait l’extraction clandestine des minerais et boosterait la fraude qui prend de l’envol. Les consommateurs ou acheteurs finaux sont ainsi alertés. Ils doivent dès lors se méfier des comptoirs et des négociants qui leur vendent des produits extraits des concessions sur lesquelles ils n’ont aucun droit ou sur base des contrats dont ils ne peuvent justifier la validité juridique. Car, en définitive, ce sont des minerais volés au détriment des vrais propriétaires qui s’accommodent au pays du devoir de diligence et se conforment aux règlementations nationales. C’est une pratique somme toute indécente qu’ils ne peuvent encourager.
Zoé Kabila interpelé
Cette manière de faire, qui enfreint autant à la législationnationale qu’internationale, est périlleuse pour l’Etat en général et la province du Tanganyika en particulier si jamais les minerais des 3T en provenance de cette dernière sont frappés sur le plan international à cause des pratiques qui heurtent le Devoir de diligence. La province se retrouverait à la case départ comme avant 2010 où ses minerais ont été assimilés aux minerais de sang. Il eut fallu en son temps(Juillet 2011) un lobbing très fort sous-couvert des initiatives comme «Solutions for hope» dans la province du Katanga pour créer, ceci pour la première fois dans la région, un modèle d’approvisionnement en «circuit fermé» qui s’est avéré efficace. Le modèle a utilisé un ensemble défini de fournisseurs couvrant les mines, les fonderies, les fabricants des condensateurs et les utilisateurs. En conséquence, cette initiative avait confirmé non seulement que les «minerais de sang» n’entraient pas dans la chaîne d’approvisionnement, mais créait également des avantages économiques pour les creuseurs artisanaux et leurs familles.
Berceau de la traçabilité des 3 T en RDC, le Tanganyika accepte-t-il de perdre tous les bénéfices tirés grâce à «Solutions for hope» ? Zoé Kabila, le Gouverneur de la province, et son gouvernement sont ainsi interpelés pour veiller au grain et remettre les choses en ordre. Le Code minier confère des responsabilités en la matière à l’exécutif provincial qui se trouve sous la houlette du Gouverneur. Le Passage imminent du BGR (Institut fédéral allemand des sciences de la terre et des ressources naturelles) dans cette partie de la République est une opportunité dans le cas d’espèce. Avec le concours de cet organisme, la RDC s’est dotée d’un manuel des procédures de traçabilité des produits miniers, de l’exploitation à l’exportation.
CP/Moïse Musangana