Ituri : jadis en proie aux attaques des ADF, une région du Sud-est d'Irumu retrouve le calme (Reportage)

Dimanche 14 mai 2023 - 11:25
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Le calme règne ces jours-ci dans les chefferies des Bahema Boga et Banyari-Tchabi, au Sud-est du territoire d'Irumu, à plus de 120 km de la ville de Bunia, chef-lieu de la province de l'Ituri. Il y a quelques mois, de nombreux villages de ces chefferies étaient régulièrement attaquées par des terroristes ADF et leurs supplétifs. Les artisans de cette accalmie sont les Forces armées de la République démocratique du Congo soutenues par l'armée ougandaise (UPDF), cette dernière est présente dans la région depuis le début de l'année 2022, dans le cadre de la mutualisation des forces.
Malgré ce calme, certains habitants ressentent encore la peur suite aux atrocités qui avaient eu lieu dans la région, et ne se rendent pas dans leurs champs éloignés.

Reportage 

A Boga centre (communément appelé Kinyanjodjo), chef-lieu de la chefferie des Bahema Boga, les habitants ont regagné leurs domiciles depuis plusieurs mois et les activités socio-économiques et scolaires tournent en plein régime suite à l'accalmie qui s'observe dans la région.
La population s'adonne à nouveau aux travaux champêtres et le marché ouvre tous les jours.

« J'avais fui Boga en 2021 pour trouver refuge à Bunia. Ça fait une année depuis que je suis revenu. Actuellement, nous sommes calmes ici. Je cultive le champs et je vends (mes produits, ndlr) au marché », a témoigné Esperance Bongerize, une marchande rencontrée au marché de Boga, le mercredi 10 mai 2023.

Le succès de l'état de siège 

Le mototaxi circule librement et assure le transport. Dieudonné Sabiti Miramago, un taximan de Boga centre depuis 7 ans, salue le travail abattu par les armées congolaise et ougandaise en cette période de l'état de siège : « Ici, nous travaillons bien maintenant. L'état de siège nous a aidé à restaurer la paix. Mais aussi, l'armée ougandaise. Nous partons facilement à Tchabi (15 km), à Kainama (à une trentaine de km au Nord-Kivu) ».

Cependant, ces conducteurs des motos dénoncent les tracasseries dont ils sont victimes suite à l'existence des barrières « illégalement érigées » sur certains tronçons.

« Sur la route de Bunia (environ 120 km), il y a beaucoup de barrières où l'on est obligé de donner de l'argent. Cette situation rend notre travail compliqué », regrette un autre taximan.

Non loin de là, à Tchabi dans la chefferie des Banyari-Tchabi, à environ 15 km de Boga, le même climat de paix règne, à la satisfaction de Innocent Mapendo, un habitant de cette localité : « Je vis ici à Tchabi. C'est depuis plus d'un mois que nous sommes calmes ici grâce aux FARDC (Forces armées de la République démocratique du Congo) et l'armée ougandaise. Je suis rentré ici après avoir été au site des déplacés ».

Des habitants hésitent de regagner leurs domiciles

Malgré l'accalmie qui règne dans la région, la peur due aux affres vécues par le passé est toujours présente dans le chef de certains habitants.
Sur 58 villages de 4 groupements que compte la chefferie des Bahema Boga, seuls 26 sont de nouveau habités. Les autres demeurent inhabités, selon la société civile locale. Les séquelles et les stigmates des violences armées qui ont eu lieu dans la région empêchent également d'autres habitants d'aller faire le champs loin des villages. Pour y remédier, la population plaide pour une augmentation de l'effectif militaire.

« Avant l'état de siège, il y avait beaucoup d'atrocités chez nous, mais avec l'arrivée de l'état de siège, ça a essayé quand-même de réduire le nombre d'attaques. Nous félicitons vraiment les efforts fournis par les autorités de l'état de siège qui ont retabli la paix aujourd'hui dans notre chefferie. Mais, il faut renforcer l'effectif des militaires », a affirmé David Kisembo, président de la société civile de Boga.

L'effectif militaire bientôt renforcé

Au sujet de l'effectif militaire, au cours d'un point de presse tenu mercredi 10 mai à Burasi, dans la chefferie des Bahema Mitego, sur les deux ans de l'état de siège, le gouverneur militaire a annoncé l'arrivée imminente de nouvelles unités de l'armée pour renforcer celles qui existent.

« Le commandant suprême a toutes ces informations là. Nous allons bientôt combler ce déficit, nous allons combler ces limites pour que la population vive en paix », a promis le lieutenant-général Luboya N'kashama Johnny.

Il y a quelques années, des attaques répétitives des ADF contre les localités des Bahema Boga et Banyari-Tchabi étaient fréquemment enregistrées. Dans la nuit du 31 mai au 1er juin 2021, quelques jours seulement après l'instauration de l'état de siège, plus de 55 déplacés ont été sauvagement tués dans un site à Boga.

Séraphin Banangana, de retour de Boga-Tchabi