Dernière session du Parlement : Kengo et Minaku dans l’embarras

Jeudi 17 mars 2016 - 10:34

Le mot « glissement » est présent dans presque tous les esprits depuis la tentative manquée, en janvier 2015, de révision de la loi électorale, en son point relatif au conditionnement de la tenue de l’élection présidentielle à l’identification et au recensement général de la population. Aussi, chaque fois qu’un acteur politique de premier plan s’exprime au sujet du processus électoral, du Dialogue ou de la Constitution, son discours est examiné à la loupe, afin de savoir s’il est « pro » ou « anti-glissement ».

Léon Kengo wa Dondo, président du Sénat, et Aubin Minaku, président de l’Assemblée Nationale, ont fourni, dans leurs mots d’ouverture de la session parlementaire de mars, de gros efforts pour tenter d’apaiser le souverain primaire, fort inquiet du blocage du processus électoral. L’un et l’autre ont promis d’accorder le bénéfice de l’urgence à tous les projets de loi dont aurait besoin la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) pour les opérations préélectorales et électorales.

Le président de la haute chambre du Parlement a réchauffé les cœurs de certains en martelant que la Constitution en vigueur était « complète, démocratique et stable ». Dans l’entendement de nombre d’observateurs, il s’agit d’un énième appel au respect strict de la Constitution et, partant, d’un refus catégorique de toute révision de celle-ci. Quant à son collègue de l’Assemblée Nationale, il a lancé un appel appuyé à la culture des valeurs démocratiques de dialogue, de tolérance, de respect des différences, etc.

Ce que beaucoup attendaient des deux hauts responsables des deux chambres du Parlement, c’est par exemple l’annonce de la fin des mandats des sénateurs et députés, au motif que l’actuelle session du Parlement devrait être la dernière de la législature en cours. Car, selon les prescrits de la Constitution, les élections présidentielle et législatives nationales, verrouillées par le législateur, devraient impérativement se tenir cette année. A ce propos, la CENI les avait placées à la date du 27 novembre 2016 dans son « Calendrier électoral global » publié en février 2015. Dans tous les cas, même si le chronogramme des élections était réaménagé par consensus, ces deux scrutins devraient échapper au fameux « glissement ».

A en croire le même calendrier global, le corps électoral pour la présidentielle et les législatives nationales devrait être convoqué le 6 mai 2016. Si les deux scrutins devraient réellement se tenir au courant de cette année, Kengo et Minaku auraient pu parler, même au conditionnel, de l’hypothèse de la fin de la législature en cours et exhorter les honorables sénateurs et députés à prendre leurs dispositions afin de ne pas être surpris par les événements.

D’aucuns interprètent le silence de ces deux responsables politiques comme le signe de leur embarras face aux réalités du processus électoral, pour lequel certaines opérations préélectorales exigent des délais qui vont concourir au « glissement ». L’enrôlement des électeurs, par exemple, devrait consommer au moins 16 mois, à compter de son début effectif. Or, l’on en est encore à l’étape de l’appel d’offres, avant celle de la commande.

 

Dialogue : la grande inconnue

 

Mais la grande inconnue du processus électoral se trouve être maintenant le Dialogue, présenté comme le préalable majeur à tout redémarrage du processus électoral. Ce forum, ainsi que tout le monde peut le constater, n’est pas près d’être convoqué. Réclamé et soutenu comme la « voie royale » de la sortie de crise politique et institutionnelle qui plombe le processus électoral, il se trouve dans une phase que seuls les « initiés » sont en mesure de contrôler. Quant au commun de Congolais, il constate que le Facilitateur Edem Kodjo multiplie les navettes entre Kinshasa, Addis-Abéba et Bruxelles …que la Majorité présidentielle et une partie de l’Opposition ne cessent d’appeler ce dialogue de tous leurs vœux… que les anti-dialogue donnent de la voix pour le décrire comme le Cheval de Troie porteur du « glissement ».

Dans l’hypothèse où il finirait tout de même par se tenir, ce forum épouserait forcément le « grand format », avec pas moins de 500 participants, tirerait en longueur, dans la pure tradition congolaise des « tables rondes » politiques élastiques. On voit mal des Congolaises et Congolais réunis pour débattre des questions vitales de la Nation, se séparer au bout d’un mois. Bref, techniquement (opérations préélectorales) et politiquement (Dialogue et mise en œuvre de ses Résolutions), le peuple congolais semble condamné à « glisser ».

Kimp