NewsForum sur la lutte contre les flux financiers illicites : Patrick Muyaya insiste sur la mise en place d'un Parquet financier

Jeudi 9 décembre 2021 - 12:52
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L'atelier d'échanges multiacteurs sur la lutte contre les flux financiers illicites, le blanchiment d'argent et le rôle du système financier en République démocratique du Congo, organisé par Actualité.cd en collaboration avec l'ONG Open Society Initiative for Southern Africa (OSISA), s'est clôturé ce mercredi 08 décembre 2021 dans la ville de Kinshasa. 

Le dernier jour de ces assises a été consacré au thème : "Lutte contre les flux financiers en RDC : état des lieux et perspectives", développé par trois intervenants, à savoir : le député national Jean-Pierre Pasi Zapamba, président du Réseau des parlementaires africains contre la corruption (APNAC), Jimmy Kande, ancien gestionnaire et analyste crédit à la Banque commerciale du Congo (BCDC), et Patrick Muyaya, ministre de la Communication et médias. 

Le premier a, dans son intervention, expliqué en long et en large le concept flux financiers illicites. À en croire ce député national, les flux financiers sont l'ensemble des mouvements des fonds qui échappent au contrôle des autorités compétentes.

"Nous, par exemple, vous savez qu'aujourd'hui à l'Est, nous sommes attaqués. On se pose la question : ceux-là qui nous attaquent qui sont-ils ? Où puisent-ils les moyens avec lesquels ils se procurent des armes ? Comment sont-ils alimentés ? Tout cela, ce sont ces flux là, ce sont ces moyens qui passent par des voies illégales, par des voies non autorisées. Et c'est l'ensemble des opérations, d'une manière ramassée, que nous pouvons appeler des flux financiers. Ce sont des sorties des fonds, des mouvements des fonds qui ne sont pas autorisés, qui passent par des voies détournées et qui échappent au contrôle des institutions établies", a déclaré J-P Pasi Zapamba. 

Pour sa part, Jimmy Kande qui est aussi membre de la campagne "Congo n'est pas à vendre", est revenu sur la fragilité du système financier congolais qui favorise les flux financiers illicites. Cela, a-t-il souligné, résulte, notamment du fait que la loi de 2004 sur le blanchiment des capitaux en RD Congo n'ait pas été adapté à l'environnement actuel.

"On parle également de la Cellule nationale de renseignements financiers qui est sensé jouer un rôle important, mais vous pouvez vous rendre compte que les banques aujourd'hui sont tenues de faire ce qu'on appelle une déclaration d'opération suspecte. Mais le nombre de déclarations d'opération suspecte que la CENAREF reçoit ne représente qu'une infine partie de la réalité dans le secteur bancaire. En ce moment là on se pose la question sur la capacité réelle de la CENAREF à pouvoir lutter contre le blanchiment des capitaux. Et depuis la création de la CENAREF, il n'y a eu que 20 dossiers qui ont été transmis au niveau de la justice et sur ces 20 dossiers, il n'y a qu'un seul dossier qui a pû connaître un jugement lorsque les juges ont décidé de requalifier les faits. On parle de 20 dossiers, lorsqu'on voit tous les scandales financiers qui existent aujourd'hui en RDC, on se pose la question de savoir si 20 dossiers correspondent à la réalité ?", s'est-il interrogé.

Et de renchérir : "Il y a aussi le rôle du régulateur qui est la Banque centrale où on voit très bien que la plupart de missions de la Banque centrale ne tournent pas sur les questions de blanchiment des capitaux. C'est beaucoup plus sur le management, les normes prudentielles. Mais aucune banque à ce jour, n'a été sanctionnée pour des faits de corruption". 

Pour changer ce fait, le ministre Muyaya a, quant à lui, réaffirmé la volonté du gouvernement de lutter contre la corruption dans toutes ses dimensions.

"Je crois qu'il y a des choses qui méritaient d'être dites ici parce que le gouvernement n'est pas resté les bras croisés. Parce que premièrement, nous avons renforcé une structure qui existait qui s'appelle l'Inspection générale des finances (IGF) mais qui aujourd'hui on en parle de plus en plus, et qui a abouti à des décisions. Une volonté politique qui est arrivée. Le fait d'avoir l'IGF ne suffit pas, il y a une Agence congolaise de lutte contre la corruption, il y a les services de CENAREF, même si la CENAREF est logée à la banque centrale. Mais je crois qu'il y a des choses qui se font", a dit Patrick Muyaya.

Par ailleurs, il a insisté sur la mise en place d'un Parquet financier en vue de renforcer la lutte contre la corruption et tous ces maux qui rongent l'économie du Congo-Kinshasa.

"Je crois qu'il y a un besoin d'avoir un appareil  de répression ou de suivi de tout ce qui est question financière en place, solide et un mécanisme qui permet de censurer. Je vous ai dit tout à l'heure que je pense qu'il nous faut un véritable Parquet financier qui soit à mesure de traquer, de suivre de près ce qui se passe", a martelé le ministre de la Communication et médias. 

Clôturant cet atelier, Nick Elebe, directeur-pays d'OSISA, a salué la qualité des interventions.  Il a affirmé que durant les trois jours d'atelier, les échanges ont été "enrichissants". D'où, ses remerciements à l'endroit des intervenants et participants y compris les banques opérationnelles en RD Congo, pour leur "engagement, la production intellectuelle et scientifique".

Prince Mayiro