Romain Molina, écrivain, journaliste et enquêteur français, a rendu public le jeudi 03 novembre 2022, une enquête sur des cas d'abus sexuels dans le milieu du football congolais, impliquant plusieurs entraîneurs connus qui continuent à travailler dans certains clubs du pays.
Dans son enquête publiée par le média Sport News Africa, le journaliste dit avoir contacté plusieurs acteurs du football congolais tels que des coachs, dirigeants, et agents des joueurs afin de recouper plusieurs versions sur la pédophilie, les abus sexuels et les pratiques fétichistes qui sévissent dans le milieu du football congolais.
Plusieurs révélations "troublantes" ont été faites dans cette enquête où, dans plusieurs audios (notes vocaux) utilisés comme preuves matérielles pour soutenir ses affirmations [dont les copies ont été envoyées à 7SUR7.CD], on peut entendre des voix d'un entraîneur d'une académique à Lemba, exiger de coucher avec un petit garçon de 16 ans pour lui faire signer un contrat.
"C'est comme ça que ça fonctionne dans notre football, tu peux marquer des buts comme tu veux, mais tu dois donner les fesses et faire des sacrifies des vies humaines pour signer et devenir star, sans quoi tu ne vas rien faire", peut-on entendre dans les audios.
Contacté à ce sujet par R. Molina, l'ancien capitaine de la RDC Youssouf Mulumbu confirme avoir été plusieurs fois contacté par ses coéquipiers et des jeunes pour dénoncer ces pratiques. "Ce n'est pas un cas isolé, c'est un système qui est bien instauré depuis bien longtemps", a-t-il avancé.
L'ancien joueur de Lupopo révèle qu'il est en train de travailler dessus pour faire éclater cette affaire, même si beaucoup de joueurs refusent de témoigner par peur ou par honte.
L'enquête cite "directement" Bertin Maku, l'actuel entraîneur adjoint de Lupopo, ancien de Racing club de Kinshasa, comme l'un de prédateur sexuel, selon plusieurs témoignages lui parvenus après deux ans d'enquête. Il poursuit en affirmant que ce dernier promet des places et du temps de jeu aux joueurs en contrepartie des actes sexuels ou de l'argent.
"La fédération a été plusieurs fois saisie pour ces cas, même son vice-président, Théobald Binamungu a été interpellé par le sélectionneur Papy Kimoto en 2020 lors du tournoi de U20, mais rien n'a été fait pour mettre fin à ces pratiques. C'est un système qui existe depuis plus de deux décennies", confirme l'enquête de Romain Molina.
D'après ces révélations, Papy Kimoto aurait aussi évoqué ce phénomène dans une des réunions des entraîneurs, mais a été contredit par Florent Ibenge, alors entraîneur de Vita Club à l'époque et Médard Lusadusu, le directeur technique national. "Ce sont leurs vies privées, on ne peut pas entrer dedans", avaient-ils dit, comme le poursuit l'enquête.
À en croire le dossier, plusieurs autorités du pays, responsables de la fédération congolaise de football association (FECOFA), le gouverneur du Haut-Katanga et président de Lupopo, Jacques Kyabula, ainsi que quelques présidents des Ententes Urbaines de football ont été contactés mais soit, ils n'ont jamais voulu répondre et d'autres ont raccroché au nez.
Romain confirme avoir de nombreuses plaintes de jeunes enfants qui rêvent une carrière sérieuse dans le football congolais, mais sont contraints à faire des choses "horribles" poussés par des personnes bien identifiées qui ne sont malheureusement pas inquiétées. le cas d'un autre entraîneur, Guy-Roger Limolo ancien de Rangers et Renaissance du Congo, pris en plein ébat sexuel avec un jeune garçon dans les toilettes du stade Tata Raphaël, mais n'a jamais été interpellé.
Toujours dans la même enquête, ces révélations ont été confirmées par un autre ancien international congolais, Ilunga Hérita, actuellement président de l'Union de Footballeur du Congo (UFC) et membre de Fifpro, un syndicat Mondial de footballeur international. Ce dernier affirme avoir des témoignages et des preuves sur ces pratiques depuis maintenant plusieurs années et a même saisi la FIFA à ce sujet.
Par ailleurs, depuis la parution de ces révélations, la Fédération Congolaise de Football qui a été cité n'a toujours pas dit quelque chose à ce sujet.
Pour rappel, Romain Molina dans ses enquêtes a fait éclater ce même genre de révélations au Gabon, en France, en Haïti, en Colombie, au Mali et dans plusieurs pays où les abus sexuels se font depuis bien longtemps. Les responsables sont pour la plupart derrière les barreaux jusqu'à ce jour.
Gede Luiz Kupa