Cour de cassation : le procureur général déplore l'exposition aux médias des détenus jouissant de la présomption d'innocence par des OPJ et magistrats

Jeudi 17 octobre 2024 - 14:18
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Dans sa mercuriale à l'audience solennelle de la rentrée judiciaire 2024-2025, ce mardi 15 octobre 2024, le procureur général près la Cour de cassation, Firmin Mvonde Mambu, a tablé sur "la portée de la présomption d'innocence dans une instruction prejuridictionnelle".

Il s'est notamment insurgé contre le comportement de certains officiers de police judiciaire et magistrats du parquet qui se plaisent à présenter les personnes poursuivies comme étant des coupables alors qu'aucun jugement ne les a condamnés.

C'est notamment, a-t-il souligné, le cas des OPJ  qui promènent une personne arrêtée avec la poule au cou. Le PG rappelle que l'enquête préliminaire est secrète. Les OPJ ne peuvent donc tenir des points de presse qu'avec l'autorisation du Procureur de la République.

Le numéro un de tous les magistrats debout a par ailleurs fustigé ce qu'il a qualifié de " tribunal des réseaux sociaux ". Pour lui, l'utilisation abusive des réseaux sociaux viole le principe de la présomption d'innocence, car il suffit de faire l'objet des poursuites pour déjà être déclaré coupable sur Internet.

"Le Tribunal des réseaux condamne sans le moindre élément de preuve et la RDC semble être devenue ce pays des détourneurs. Et lorsque les preuves leur sont demandées, ils jasent, ils n'ont rien dans leur gibecière. Cette utilisation abusive des réseaux sociaux viole profondément la présomption d'innocence. Un internaute qui qualifie de détourneur un gestionnaire qui fait l'objet d'enquête préliminaire ou préparatoire, tant qu'aucun jugement de condamnation n'a été rendu, il reste présumé innocent", a-t-il déclaré.

Le PG a saisi cette occasion pour rappeler que la présomption d'innocence est avant tout un principe constitutionnel, un droit fondamental de tout citoyen, un principe cardinal de la procédure pénale dans un État de droit pour un procès juste et équitable.

À l'en croire, loin d'être une garantie ou une prime à l'impunité, la présomption d'innocence est un moyen de combattre l'arbitraire. Le PG souligne que les OPJ et les magistrats du parquet sont dès lors tenus à une double obligation :  veiller à ce que le discrédit ne soit inutilement jeté sur les personnes et agir avec efficacité dans la collecte des éléments de preuve.

Parmi les atteintes à la présomption d'innocence, il a cité la garde à vue au-delà du délai légal, le fait de présenter les accusés à la presse ou les réseaux sociaux comme des coupables, le fait pour un magistrat instructeur d'envoyer en fixation devant la juridiction de jugement un dossier pour plaire à un ami ou sous la pression de l'opinion et bien d'autres cas.

Au nombre des limites au principe de la présomption d'innocence, le PG a évoqué la garde à vue dont la durée légale est de 48 heures et la détention préventive. Il a souligné que, même dans ces cas, les conditions prévues par la Loi doivent être absolument respectées.

Avant de clore son propos, le PG a appelé la presse à bien jongler entre la liberté d'expression et le droit à la présomption d'innocence, deux principes consacrés par la Constitution de la RDC. Il a souligné que ces deux principes s'accordent et se complètent et que les journalistes doivent chercher l'équilibre nécessaire entre les deux.

ODN

 

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