
Face à la dégradation alarmante de la situation dans l'est de la République Démocratique du Congo, l'ONG de défense des droits de l'homme Voix des Sans Voix (VSV) appelle à la convocation d'un dialogue interne. L'objectif est de mobiliser l'ensemble des Congolais pour faire face à la menace de balkanisation qui pèse sur le pays.
Lors d'un point de presse tenu ce dimanche 21 septembre à Kinshasa, son deuxième directeur exécutif adjoint, Pierre Serge Ntumba, a justifié cet appel par un projet de balkanisation de plus en plus évident. Ce projet se traduit notamment par l'intensification des violences et l'installation d'une administration parallèle dans les zones occupées par la coalition AFC/M23.
Il a souligné le risque qu'une cohabitation prolongée entre les habitants et les agresseurs ne conduise, à terme, à l'acceptation de ces derniers, rendant ainsi difficile le rétablissement de l'autorité de l'État dans l'est du pays.
"En définitive, la VSV exprime des inquiétudes sur la matérialisation du plan de balkanisation qui se constate déjà par l'installation d'une administration parallèle dans les zones sous occupation de la coalition AFC/M23. Celle-ci se caractérise, entre autres, par la nomination à différents postes de responsabilité, le recrutement de magistrats, d'enseignants et d'autres fonctionnaires de l'État. Dans les zones occupées, la population subit des atteintes à son intégrité physique si elle refuse de participer au salongo instauré par les occupants. Il est à craindre qu'une cohabitation très longue entre la population et les agresseurs n'aboutisse, inconsciemment ou volontairement, à l'acceptation de ces derniers, ce qui pourrait rendre difficile la restauration et le rétablissement de l'autorité de l'État dans ni l'Est de la RDC. Il est donc temps de mobiliser les Congolais à travers un dialogue interne responsable pour la libération de l'Est de la RDC. Sinon, ce sont les autres qui risqueraient de nous imposer un dialogue, tel celui de l'ancien président sud-africain Thabo Mbeki qui a été rejeté à juste titre par les Congolais épris de paix, de stabilité et de développement pour leur pays, la RDC", a-t-il fait savoir.
Au nom de la VSV, il a martelé que ce dialogue interne doit avoir pour seul objectif de sauver la RDC et de faire face à tous les dangers, sans pour autant aboutir à un simple partage de postes.
"Malgré les souffrances indicibles qu'endure la population congolaise et la crise sécuritaire actuelle qui touche surtout les femmes, les enfants et les vieillards, victimes de violations graves et massives des droits humains et du droit international humanitaire, il y a encore des acteurs sociopolitiques qui ne voient que leurs intérêts égoïstes et leur positionnement personnel en refusant tout dialogue. Pour la VSV, le dialogue interne est plus important que toute autre initiative de paix vouée à l'échec sans le soutien de tous en interne, notamment les forces politiques et sociales comme les Églises. Il est temps de cesser de croire que le dialogue remettrait en cause les animateurs et les institutions légalement établies. Le dialogue dont il est et sera question est celui qui doit avoir pour objectif de sauver la RDC et de faire face à tous les dangers internes et externes qui la menacent. Ne dit-on pas que l'union fait la force et qu'il est difficile pour un royaume divisé de vaincre son ennemi", a déclaré Pierre Ntumba.
La VSV s'est montrée critique envers les accords de paix récents, comme l'Accord de Washington du 27 juin 2025 et la Déclaration de principes de Doha du 19 juillet 2025. Bien qu'elle salue les efforts diplomatiques du gouvernement, l'ONG déplore que ces initiatives n'aient pas abouti à des résultats concrets sur le terrain.
"En clair, face à la persistance de la crise, l'impression qui risque de se dégager est qu'une accumulation d'accords et de déclarations ne peut pas faciliter le retour de la paix en RDC. Trop d'initiatives de paix, bien qu'encourageantes, peuvent se neutraliser, car chacune cherche à être la meilleure. Cela se fait malheureusement au grand dam des Congolais et de leur gouvernement. Pour la VSV, et à la lumière de ce qui précède, on peut affirmer que la Déclaration de principes de Doha et l'Accord de paix de Washington n'ont malheureusement pas facilité la mise en œuvre effective de la Résolution 2773 du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui exigeait entre autres le retrait inconditionnel du territoire national de la RDC de l'armée rwandaise et des éléments de la coalition AFC/M23", a affirmé Pierre Ntumba.
Par ailleurs, la VSV a fait part de ses inquiétudes face à la crise politique qui secoue l'Assemblée nationale. L'ONG espère que cette crise ne relèguera pas au second plan la situation dans l'Est et les problèmes sociaux du peuple congolais. Son deuxième directeur exécutif adjoint a exhorté les élus à agir en âme et conscience pour préserver la cohésion nationale.
"La VSV demande aux élus mis en cause par leurs collègues de tirer la leçon de ce qui leur est reproché pour changer, au cas où ils bénéficieraient de la clémence de leurs collègues. Au cas où ils seraient déchus de leurs fonctions, ils doivent privilégier l'intérêt supérieur de la RDC en apportant leur contribution pour un meilleur fonctionnement de l'Assemblée nationale", a indiqué Pierre Ntumba.
Enfin, la VSV a déploré la dégradation des conditions de vie dans la capitale, Kinshasa, en fustigeant les embouteillages, le manque d'eau potable et les coupures d'électricité récurrentes. Tout en saluant la décision du président de la République de désengorger la circulation routière avec la possibilité d'appeler l'armée en renfort, la VSV a demandé aux autorités de fournir tous les moyens nécessaires aux forces de l'ordre pour que cette mesure ne se transforme pas en une source de tracasseries supplémentaires pour les usagers de la route.
L'ONG a également dénoncé l'avancement à pas de tortue des multiples chantiers routiers, qui sont à l'origine de la détérioration de la circulation.
Merveil Molo