Dialogue, l’UDPS tient à sa feuille de route qu’elle a remise à Kalev

Mardi 19 mai 2015 - 09:03

En perspective du dialogue confirmé par Joseph Kabila, le mercredi 13 mai à sa ferme de Kingakati devant des bonzes de la majorité, l’UDPS étale sa feuille de route datée du 14 février de l’année en cours et portant la signature d’Etienne Tshisekedi, depuis Bruxelles où il séjourne pour des soins médicaux.

Dans sa feuille de route, Tshisekedi demande au Représentant du secrétaire Général de l’ONU en Rd- Congo, Martin Kobler et au collège d’Envoyés Spéciaux de la communauté internationale et de l’Union Africaine dans les Grand Lacs de jouer pleinement leur rôle diplomatique de médiation en prenant, de toutes urgences, les contacts nécessaires avec les parties rd-congolaises afin de définir le cadre d’organisation effective du dialogue dans un court délai. Tshisekedi propose comme sujets à débattre dans le cadre de ce dialogue: le contentieux électoral de novembre 2011, un calendrier con¬sensuel, l’audit externe du fichier électoral. Selon une source fiable à l’UDPS, le parti d’Etienne Tshisekedi a fait parvenir sa feuille de route à Joseph Kabila via son émissaire Kalev, lors de ses consultations après différentes forces vives. Sur le même ordre d’idées, dans sa feuille de route, l’UDPS tient au respect de la Constitution. «Lire ci-dessous la feuille de route de l’UDPS»

1. CONTEXTE GENERAL
A. RAPPEL DE QUELQUES ELEMENTS HISTORIQUES
La situation tant politique que sociale en République Démocratique du Congo (RDC) demeure toujours préoccupante et constitue un cas d’urgence. Une crise politique grave, née des dernières élections de novembre 2011, a fini de plomber sérieusement l’avenir du processus de démocratique du pays.

Depuis 1996, année du début des conflits ‘armés à répétition, qui jusqu’à ces jours, endeuillent les popu¬lations congolaises, la Com¬munauté Internationale n’a cessé de s’investir pour ra¬mener la paix et accompag¬ner le pays dans ses efforts de normalisation de la vie politique par un laborieux processus de démocratisa¬tion. C’est grâce aux Nations Unies qu’a été signé l’Accord de paix et de cessez-le feu de Lusaka dont le chapitre prévoyait l’organisation et la tenue des négociations politiques inter congolaises (Dialogue Inter Congolais).

Au cours du Dialogue inter congolais à Sun City, toute la classe politique congolaise réunie, a relevé unanime¬ment les causes fondamen¬tales de la persistance de la crise sociopolitique que connait la RDC et qui handi¬cape son développement. A savoir la mauvaise gou¬vernance et le manque de légitimité des’ institutions nationales et de leurs ani¬mateurs. L’Accord Global et Inclusif qui sanctionnera ce dialogue, conclut que pour mettre fin définitivement à l’origine des crises et donner au pays les chances de se reconstruire, les dirigeants du pays devaient être élus démocratiquement au terme d’élections libres, transpar¬entes et crédibles. Ainsi une transition de deux ans, sui generis (Formule 1+4), fut instituée en vue de conduire le peuple congolais aux élec¬tions générales, telles que voulues par l’Accord, après que certains préalables soi¬ent réalisés. Ces derniers étant considérés comme la condition sine qua non à la tenue des élections.

• Ces préalables visaient la paix sociale et un cli¬mat général de confiance qu’exigent de pareils enjeux majeurs pour une nation. Il s’agissait notamment de:
• la réconciliation nationale;
• la restauration de l’autorité de l’Etat sur toute l’étendue du pays;
• le recensement de la pop¬ulation:
• l’unification des armées belligérantes en une seule armée républicaine
• la réforme des services de sécurité : renseignements et police nationale notam¬ment:
• un minimum de dividendes socio-économiques pour le peuple.
• Il convient de souligner que l’Accord Global et Inclu¬sif prévoyait également dans ses objectifs de la transition notamment en son point 4;

« L’organisation d’élections libres et transparentes à tous les niveaux, permet¬tant la mise en place d’un régime constitutionnel et démocratique ».
En plus des institutions de la transition, des institutions d’appui à la démocratie ont été créées, notamment une Commission Electorale In¬dépendante (CEI). Il faut rappeler que les résolu¬tions de Sun City avaient déjà défini le cycle électoral, notamment en posant un préalable aux élections par l’organisation d’un recense¬ment de la population.

Force est de constater que le gouvernement, de transition (1+4), dont l’Union pour la Démocratie et le Progrès So¬cial (UDPS) n’était pas par¬tie prenante, a Chamboulé les cadres de référence du cycle électoral et aucun re¬censement préalable aux élections ne fut organisé.

Il échet également de re¬lever que le leadership … s’avéra incompétent, cor¬rompu et incapable d’assurer I gestion courante du pays et de répondre aux préoc¬cupations des Congolais. Devant le naufrage visible de la transition et bien avant l’organisation des élections, notre parti, I’UDPS saisit le Comité International d’Accompagnement de la Transition (CIAT), organe officiellement appelé à rem¬plir le râle d’arbitre et de médiateur aux fins d’évaluer le processus et de réunir un minimum de consensus au¬tour de certains préalables majeurs, pour obtenir des élections crédibles et trans¬parentes.

Résultat : non seulement, l’UDPS ne fut suivie, mais se trouva totalement en dehors de ce grand rendez-vous de notre Histoire que furent les élections de 2006 dans l’organisation fut confiée à une CEI totalement instru¬mentalisée et aux ordres du pouvoir en place.

B. Elections de 2006

Organisée sur un processus électoral vicié, les élections débouchèrent sur des af¬frontements à l’arme lourde, en plein centre d’une grande ville de plus de dix millions d’habitants. Le bilan, jusqu’à ce jour, n’a pas encore été officiellement confirmé. En effet, les principaux chefs de guerre qui s’étaient acca¬parés de la vie politique na¬tionale et se trouvaient être les potentats de l’espace présidentiel (1 + 4) furent les grands animateurs de ces joutes électorales in¬édites. Et comme par calculs égoïstes dans le contrôle du pouvoir, ils avaient gardé en réserve des troupes et mi¬lices fidèles afin de dispos¬er des forces nécessaires â la conquête du pouvoir. Ils réglèrent leur contentieux électoraux sur leur terrain de prédilection, l’arme au point.

C. ELECTIONS DE 2011

Bien que le processus fût tout aussi vicié qu’en 2006, l’UDPS leva l’option de dé¬fier le régime de KABILA dans les urnes. Car, devant la déliquescence du pays et la dégradation dramatique des conditions de vie des Congolais, ne pas relever ce défi apparaissait comme un acte criminel de non as¬sistance à peuple en danger. Notons à ce niveau, qu’une forte tension régnait au sein de la population congolaise qui, ayant déjà enregis¬tré un lourd tribut en perte des vies humaines lors de la campagne électorale, s’apprêtait à en découdre à mains nues, avec les hordes armées du régime. Encore une fois, les représentants de la Communauté interna¬tionale ouvriront un ballet diplomatique auprès du vé¬ritable vainqueur des élec¬tions, Monsieur Etienne Tsh¬isekedi wa Mulumba pour lui demander de lancer des appels au calme à la popu¬lation, avec promesse de s’occuper sérieusement du litige électoral qui perturbait ainsi l’ordre social et la paix.

Jusqu’à ce jour, nous atten¬dons toujours que justice soit faite et que le processus démocratique en RDC soit crédibilisé afin d’amener le peuple à y souscrire. Il y va de La confiance du peuple au processus de la démoc¬ratisation et de la crédibilité de tous les acteurs: Com¬munauté internationale et tous les démocrates des partis politiques et de la so¬ciété civile.

Il. Causes de la persistance de la crise en RDC
Il échet de constater que depuis le premier cycle élec¬toral de 2006, la solution au conflit électoral s’est réglé par la voie des armés: ce qui a occasionné la mort de plusieurs congolais.
En effet, les résultats con¬testés de la présidentielle de 2006, ont occasionné des pertes considérables en vies humaines tant dans la capi¬tale qu’à l’intérieur du pays.
En 2011, lors des manifes¬tations du 26 novembre, il échet également de re¬lever qu’il y a eu systéma¬tiquement. des violations des droits humains par des meurtres, des assassinats, des arrestations arbitraires des opposants, des intimi¬dations et des tirs à balles réelles sur lés manifestant dont plusieurs morts furent à déplorer. Rappelons avec force les derniers événe¬ments du 19 janvier au 23 janvier 205 portant sur les contestations populaires du projet de la loi électorale, qui conditionne le recense¬ment comme préalable, à l’organisation des élections, Monsieur Kabila a fait de nouveau un usage excessif de la force…

Négliger ou ne pas prendre la mesure exacte du niveau, de frustrations des popula¬tions congolaises, malgré le semblant de longue pa¬tience et le refus de la vio¬lence dont elles font preuve, c’est consacrer un pouvoir assis sur un volcan de dé¬tonation sociale mal connue.
Cette situation déplorable a replongé la RDC depuis 2011 dans une nouvelle crise de légitimité qui ne per- met pas à l’Etat Congolais de fonctionner normalement. Il y a blocage: Il y a impasse.
Son ampleur est telle que si rien n’est fait, la RDC court le risque d’une implosion avec toutes les conséquences in¬calculables pour la Sous-ré¬gion et en Afrique.
C’est pourquoi, l’UDPS pro¬pose un règlement de la crise actuelle par la voie d’un dialogue politique.

III. Règlement rapide et satisfaisant de la crise par l’organisation du dialogue politique

A. Configuration politique

Les élections de 2011 ont eu le mérite de reconfig¬urer politiquement la classe politique congolaise et de recadrer la ligne de démar¬cation claire entre ceux qui soutiennent le système en place et leurs alliés, d’un côté, et ceux qui récla¬ment la vérité des urnes de l’autre.
Deux tendances se dessi¬nent clairement entre les tenants du statu quo et ceux qui militent pour le change¬ment. Ainsi, le contentieux électoral de 2011 se trouve être la cause essentielle de la crise politique actuelle en République Démocratique du Congo.

Il va sans dire que ce dia¬logue pourra mettre autour d’une table :
- Le président Etienne Tsh¬isekedi et ses alliés pour le camp du changement
- Monsieur Joseph Kabila et les siens pour le camp du statu quo
- La Modération sera assu¬rée par l’Envoyé Spécial du Secrétariat Général des Na¬tions Unies en RDC et Chef de la Monusco, conformé¬ment à la résolution 2147 du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui dispose ce qui suit:
« Autorise la Monusco à appuyer, en coordination avec l’équipe de pays des Nations Unies et d’autres acteurs y compris par l’intermédiaire des bons of¬fices du Représentant spé¬cial du Secrétaire général, les efforts des autorités de la République Démocratique du Congo pour mettre en oeuvre les réformes prévues par l’Accord-cadre et pour stabiliser l’Est du pays et, à cet effet, à :
- Promouvoir la consoli¬dation de la paix et ‘un dialogue-politique trans¬parent et sans ‘exclusive entre toutes les parties pre¬nantes congolaises en vue de favoriser la réconcilia¬tion et la démocratisation et encourager l’organisation d’élections crédibles et transparentes, conformé. ment au cycle électoral et à la Constitution. (…) »

B. Lieu de la tenue du dia¬logue Kinshasa, capitale de la RDC

C. Taille et composition

40 participants répartis équitablement entre les deux tendances politiques en présence et leurs alliés respectifs, soit 20 membres par délégation.
D. Ordre du jour
Premier volet: Règlement du contentieux électoral de novembre 2011 et son corollaire qui est la crise de légitimité
• Ceci implique d’identifier les responsables de la fraude électorale des élections or¬ganisées en 2011
• Il faudra que les respon¬sables à l’origine de la fraude électorale soient écartés de la gestion du pays à tous les niveaux et du déroulement du processus électoral en cours.
Deuxième volet définir : dé¬finir un processus électoral consensuel

1) Sur le calendrier électoral
*Définir un nouveau cycle électoral de manière con¬sensuel
*Il convient de rappeler que nous avons eu deux cycles électoraux incomplets et en¬tachés d’irrégularités, mani¬festes *Nous préconisons l’organisation premièrement de l’élection présidentielle qui pourra être couplée aux élections législatives dans le délai constitutionnel, soit, conformément à l’article 73 de la Constitution, au plus tard avant le 19 septembre 2016.
*Les autres scrutins dev¬ront être organisés après les élections présidentielle et législatives.

2) Sur la restructuration de la CENI
Eu égard aux expériences passées, les cycles élector¬aux 2006 et 2011 où les membres de la CENI ont été instrumentalisés, il convient de mettre en place’ une CENI dont les membres sont constitués de manière pari¬taire, à savoir 12 membres dont 6 sont désignés parle camp du système KABILA et 6 autres désignés par le camp du changement; mais tous devront être choisis uniquement au sein de la société civile.
Cette CENI doit avoir une présidence ‘collégiale (2 présidents, représentant chaque camp).
A défaut de cette formule, tous les membres doivent être désignés par consen¬sus.

3) Sur le contentieux élec¬toral
Nous prenons note de la promulgation de la loi or¬ganique portant organisa¬tion et fonctionnement de la Cour Constitutionnelle (du 15 octobre 2013).
Néanmoins, le choix de ses animateurs pose également un problème en raison de l’intervention directe de Monsieur Kabila dans leur désignation. Ceci aura des conséquences inéluctables quant à leur indépendance et autonomie.
Ceci implique également que les 9 membres de la Cour Constitutionnelle soi¬ent désignés par consensus.

4) Sur le fichier électoral
*Sur la fiabilisation du fich¬ier électoral, il faut un audit externe du fichier électoral pour garantir la transpar¬ence et la crédibilité du pro¬cessus électoral. En con¬séquence, un consensus doit être dégagé quant aux mo¬dalités de cet audit (choix du prestataire, date…)
*Sur la révision du fichier électoral : il faut un fichier électoral inclusif et nettoyé en tenant compte des nou¬veaux majeurs, des Congo¬lais de l’étranger, des non-inscrits, des doublons en amont des prochaines éché¬ances électorales.

5) Sur la traçabilité des ré¬sultats
*La problématique des té¬moins dans les bureaux de vote : présence obligatoire des témoins dans les bu¬reaux de vote, mention de leurs observations sur les PV et remise obligatoire, à chaque témoin, des copies des PV signés par tous.
• La problématique liée à la compilation des résultats : une solution consensuelle s’impose pour éviter les contestations futures et la fraude électorale.

6) Sur le renforcement du mandat de la Monusco pour sécuriser le processus élec¬toral
Il convient de rappeler que tous les différents élector¬aux depuis le cycle de 2006, se sont soldés par les vio¬lations graves des droits d l’homme et du droit hu¬manitaire (affrontement Bemba-Kabila 2006-2007, événement de novembre 2011 et plus récemment ré¬pression des manifestants’ du 19 au 21 janvier 2015). Il échet de rappeler qu’en vertu de la résolution 2147 qui renouvelle le mandat de la Monusco jusqu’en mars 2016, celle-ci remplit sa mission de bons offices pour un soutien logistique du pro¬cessus électoral.

Il convient dès lors de ren¬forcer le mandat de la Mo¬nusco pour qu’elle assure la libre circulation des per¬sonnes lors des opérations, électorales qu’elle puisée assurer une protection effi¬cace des civils lors des man¬ifestations portant sur des contestations liées au pro¬cessus électoral, Par con¬séquent, elle doit pouvoir intervenir en faisant usage de la force pour protéger les civils contre toutes viola¬tions des droits de l’homme commises par toute entité qui réprime les manifesta¬tions par un usage dispro¬portionné de la violence.

7) Sur la création d’un ob¬servatoire des élections chargé de la certification des résultats
Il convient de gréer un or¬ganisme chargé de certifier le processus électoral.
Il sera composé : de la Mo¬nusco et des représentants de la société civile congo¬laise (notamment l’église catholique et des ONG ac¬tives en matière d’élections, telle que l’AETA,.,).

Le Certificateur devra certi¬fier que tous les stades du processus électoral auront fourni toutes les garanties nécessaires pour la tenue d’élections ouvertes, libres, justes et transparentes, conformément aux normes internationales.
Le certificateur sera chargé de certifier les résultats, et une fois certifiés, les résul¬tats ne pourront faire l’objet d’aucune contestation’ non démocratique ou de com¬promissions.

F. Durée des travaux

Dix jours maximum dont 3 réservés aux travaux de la facilitation de la Monusco.
F. La responsabilité histo¬rique de la Communauté in¬ternationale
Pour toutes les raisons sus-évoquées, il y a urgence de convoquer un dialogue poli¬tique dans l’esprit de la ré¬solution 2147 et de l’Accord-cadre, particulièrement en ce moment où le peuple congolais, ayant dépassé le seuil du tolérable, pourrait être tenté par d’autres solu¬tions qui risquent de réduire à néant les efforts déployés par la Communauté Interna¬tionale dans le cheminement de la République Démocra¬tique du Congo vers un Etat de droit.

Fait à Bruxelles,
le l4 février 2015
Etienne Tshisekedi wa Mu¬lumba
Président de l’Union pour, la Démocratie et le Progrès Social