LE PM rate d’élever la RD-Congo au rang de pays à revenu moyen en 2016 : Matata - voici les chiffres de l’échec

Vendredi 18 mars 2016 - 11:55

 

 

Fin 2015, le PIB de la RD-Congo représentait 478,2 dollars par habitant. Un chiffre qui a valu au pays réputé le plus riche d’Afrique centrale la 8ème place du classement des pays les plus pauvres du monde et dément bien l’engagement du Premier ministre de faire de la RD-Congo un pays à revenu intermédiaire en 2016... On éprouve des maux de tête pour savoir comment amener l’ex-Zaïre au statut de pays émergent comme l’ambitionne l’ouvrage du chef du gouvernement porté sur les fonts baptismaux jeudi à l’Université Catholique du Congo.

 

Alors que tous les observateurs et les indices les plus sérieux du FMI démontrent que le Premier ministre a bel et bien perdu une première bataille, sinon la principale, celle à l’issue de laquelle il devait propulser la RD-Congo au rang de pays à revenu moyen tel que promis devant la Représentation nationale en 2012 lors de la présentation de son équipe gouvernementale, Matata Ponyo n’est pas avare de se lancer un défi de plus au moment où des nuages sombres apparaissent sur la scène nationale et mondiale avec la décélération du rythme de la croissance due à la chute des prix du cuivre, du cobalt et du pétrole : il a oublié un livre entretien intitulé « Pour un Congo émergent », porté sur les fonts baptismaux le 17 mars à l’Université Catholique du Congo –UCC-, disponible en librairie dès ce vendredi 18 mars 2016 18 mars, dans lequel, entre autres. «Il proclame son amour du pays et se positionne en pédagogue sur les réformes entreprises pour l’émergence du pays».

 

Le 7 mai 2012, devant la Représentation nationale dont il sollicitait l’investiture, Matata Ponyo prenait l’engagement d’élever la RDCongo «au rang de pays à revenu moyen» -entre USD 1036 et USD 12.615 de PIB annuel par habitant- à fin 2016. A 8 mois de la fin de la mandature, l’engagement du Premier ministre s’est avéré un vœu pieux, une promesse non tenue. Preuve: fin 2015, le produit intérieur brut de la RD-Congo s’élevait à USD 39 milliards. Rapporté au nombre de ses habitants -81,7 millions-, cela représentait USD 478,2 soit un budget quotidien de 1,3 dollars, l’équivalent d’une tasse de café dans les principaux restaurants et hôtels de la capitale. Des chiffres de l’échec. Ils ont valu à l’ex-Zaïre la huitième place du classement des pays les plus pauvres du monde.

 

De ce côté-là, après le score de 400 dollars de PIB par habitant enregistré fin 2014, il n’y a donc pas eu des résultats concrets pendant près de 5 ans. A l’heure du bilan, «on a préféré se baser sur le cadre macroéconomique pour vanter la stabilité du taux de change et de la maitrise du taux d’inflation», s’est plaint récemment un économiste, rappelant qu’une monnaie inconvertible comme le Franc congolais n’a pas de marché -de change- ou que le taux de change se définit par le différentiel des taux d’intérêt sur les marchés monétaires des devises concernées. On a oublié, de l’avis du même économiste, que le taux de change se détermine par l’offre et la demande des seuls dépôts bancaires libellés en diverses devises des banques. On s’est passé du programme avec le FMI comme si le pays, encore chancelant, était capable de faire face à toutes ses charges et priorités sans l’apport des partenaires financiers traditionnels...

 

Des maux de tête

Voici que tous les observateurs et les indices les plus sérieux démontrent que le Premier ministre a bel et bien perdu une première bataille, sinon la principale, celle à l’issue de laquelle il devait nous propulser au rang de pays à revenu moyen tel que promis devant la Représentation nationale. La RD-Congo est comptée parmi les 25 nations qui ont produit le moins de richesses par habitant en 2015. Elle occupe la huitième place du classement du FMI avec un PIB de 478,2 dollars. Elle ne laisse derrière que 7 pays potentiellement pauvres notamment le Libéria -469,1 dollars-; le Niger -403,4 dollars-; le Madagascar

-392,6 dollars-; la Gambie

-384,2 dollars-; le Malawi

-352,7 dollars-; la RCA

-338,7 dollars- et le Burundi

-315,2 dollars.

 

En dépit de ces évidences, Matata Ponyo n’est pas avare de se lancer un nouveau défi, un défi de plus, au moment où des nuages sombres apparaissent sur la scène nationale et mondiale avec la décélération du rythme de la croissance due à la chute des prix du cuivre, du cobalt et du pétrole: il a publié un livre entretien intitulé «Pour Un Congo Emergent», disponible en librairie dès vendredi 18 mars, où, entre autres, «il proclame son amour du pays et se positionne en pédagogue sur les reformes entreprises pour l’émergence du pays».

Voici que la réunion interinstitutionnelle convoquée mercredi l6 mars au Palais du peuple autour du Président de la République Joseph Kabila s’interrogeait encore sur la solidité de la croissance et décidait de réduire le train de vie des institutions, au moment où les réserves financières du pays ont dangereusement baissé à USD 105 millions et l’inflation a repris droit de cité. Matata n’aurait-il pas la modestie d’apprendre de ses erreurs, lesquelles erreurs tendent aujourd’hui à conduire le pays droit vers un cul-de-sac?, interroge-ton dans certains milieux, où on évoque, à titre d’exemple, ces projets de prestige non programmés au budget 2015 mais financés à la hauteur de plus d’USD 1 milliard. Parmi ces projets, Bukanga Lonzo, ce parc agroindustriel qui a tant fait rêver..., aujourd’hui l’ombre de lui-même. Sa production n’a pu satisfaire ne fût-ce que les 10% de la demande du marché local de Kinshasa. Preuve d’une gestion en panne, le parc a déjà licencié près de 150 employés pour motif de trésorerie. Quand le secteur comme celui de l’agriculture, pourtant considéré comme porteur de croissance et d’emplois sûrs, assainit pour pareilles raisons, il y a de quoi avoir peur au ventre. Ce que les mines qui sont touchées par la crise mondiale feraient pire. Que de mauvais choix! Que de mauvais signaux qui devraient inciter à la prudence!

 

Cependant, jeudi 17 mars à l’Université Catholique de Kinshasa, le Premier ministre a entrepris de lancer une nouvelle promesse au pays, celle de l’émergence, face aux cameras, devant des professeurs et des étudiants incrédules au regard de la réalité: la promesse non tenue du 7 mai 2012. Dès lors, on éprouve des maux de tête pour savoir comment amener 1‘ex-Zaïre au statut de pays émergent comme l’ambitionne l’ouvrage du chef du gouvernement porté sur les fonts baptismaux en grande pompe sans avoir réussi à l’élever au rang de pays à revenu intermédiaire. L’œuvre arrive dans un contexte politique et économique particulièrement compliqué et suscite des questionnements dans plusieurs salons comme sur les réseaux sociaux. Y aurait-il désormais un malaise entre le PM et son chef? Matata se serait-il lancé dans la course au dauphinat? Son livre, considéré par la presse parue jeudi à Kinshasa et certains milieux politiques comme une «profession de foi», serait-il un véritable projet de campagne? Au milieu de grands débats économiques qui agitent le monde, le gouvernement peut-il encore se permettre des desseins songeurs alors que les RD-Congolais ne sont pas dupes de l’irréalisme de ce comportement? Des questions fusent. L’inquiétude croit quand on s’aperçoit que face à ce discours antinomique, il y a le vide: quelques voix apportent timidement la contradiction au sein de la Majorité présidentielle mais elles reflètent des attitudes individuelles comme celle du député PPRD Simon Floribert Mbatshi Batshia à la faveur du débat consacré au projet du budget 2016.

Globalement, on entend le silence assourdissant de l’Opposition dispersée, plus préoccupée par l’alternance, incapable de faire vraiment bloc et d’offrir au pays un nouveau cap.

 

Les statistiques de la Corée du Sud

 

Au demeurant, l’émergence ne se décrète pas politiquement mais elle se construit avec des routes et des infrastructures développées, une administration à l’abri de la corruption et au dessus de tout soupçon, une économie compétitive et des dirigeants fans de la bonne gouvernance et la transparence. Personne n’a le droit de nous faire croire qu’on peut envisager un objectif noble comme l’émergence à partir d’une économie traumatisée, minée par la fraude, basée sur une production minière entièrement destinée à l’importation et avec une population pauvre ou reposant sur la stratégie de produire ce que nous ne consommons pas et de consommer ce que nous ne produisons pas. On ne rattrape pas la Chine ou la Corée du Sud sans une industrie agroalimentaire digne de ce nom ou avec 3.000 kilomètres de routes, deux avions d’occasion, 300 bus TRANSCO et une dizaine de locomotives pour un pays dont la superficie est de 2.345.000 km2. A titre de comparaison, avec 100.210 km2 de superficie, la Corée du Sud, grâce à de bonnes infrastructures, offre de nombreuses possibilités de se déplacer sereinement à travers son territoire. Le pays est desservi par le réseau ferré avec 3 types de trains, notamment le Korean train express -KTX- ou le TGV de Corée, le Saemaeul, moins rapide mais qui offre un confort très satisfaisant, et le Mugunghwa, le moins rapide des trois avec une vitesse de 110km/h mais très utile parce qu’il dessert énormément de petites gares. Toutes ces trois compagnies comptent des centaines d’unités de transport. Le réseau de bus est aussi très bien développé, il existe de nombreuses compagnies de bus. Parfois même dans les grandes villes, ces compagnies possèdent des terminaux d’embarquement séparés mais relativement proches les uns des autres. A elle seule, Korean Airlines, la compagnie nationale de Corée du Sud dispose d’une flotte de 164 avions en service et 100 en commande.

 

La Corée du Sud est le 7ème exportateur mondial de marchandises et 9 importateur -13ème  pour les services- et le commerce représente plus de 104% du PIB. La balance commerciale du pays est largement excédentaire depuis février 2012 et devrait le rester ces prochaines années. En 2015, l’excédent commercial a atteint un niveau record exceptionnel de 90 milliards de dollars. 15ème puissance mondiale, le PIB par habitant de la Corée du Sud s’élevait à 34.356 dollars en 2014. Pour rappel, en 1960, son PIB par habitant était comparable à celui des pays les moins avancés d’Afrique et d’Asie, et donc à celui de la République Démocratique du Congo.

 

Par AKM