A Kinshasa, comme dans l’arrière-pays, on ne cesse de déplorer le spectacle des jeeps, des camions, et même des motos de la police, affectés à d’autres usages que ceux pour lesquels ils ont été dotés à certaines unités et services de la police. Devenus des propriétés privées des commandants, on voit souvent ces matériels roulants assurer le transport des enfants des officiers à l’école, de leurs épouses au marché, ou l’évacuation régulière des sacs de braises, des fagots de bois, des sacs de maïs ou de manioc appartenant aux tiers.
Cela est incompréhensible surtout quand on constate que certaines missions urgentes et importantes de la police ne sont pas exécutées, faute d’engins disponibles pour les interventions. Ce n’est pas tout. Pire, les courses familiales des commandants, notent certains analystes, se font toujours avec les véhicules de la police, sans émouvoir les services chargés d’effectuer l’audit des matériels, équipements et infrastructures, ainsi que du bon fonctionnement de différents services de la police.
Les commandants ainsi épinglés, justifient ce comportement comme étant un moyen de « se débrouiller » pour couvrir leur approvisionnement en carburant et autres lubrifiants, et régler les problèmes récurrents de petites pannes.
Dans la foulée de ces plaintes, un député de Buta de la Province Orientale, était écoeuré d’apercevoir une jeep nouvellement acquise, suspendue sur des morceaux de pierre, dépouillées de tous ses pneus dont on dit qu’ils avaient servi de pièces de rechange à d’autres véhicules.
Il en est de même pour certains engins remis à la Police nationale congolaise par des partenaires techniques et financiers, qu’on voit au service exclusif des commandants et affectés à leurs activités personnelles, alors qu’ils auraient pu rendre des précieux services à la population s’ils étaient utilisés par les unités de la police.
Dans les provinces-pilotes du Programme SSAPR financé par la Coopération britannique, le même constat est enregistré. Cette situation tend à se généraliser au sein de certaines unités et services de la police.
Le Réseau pour la réforme du secteur de sécurité et de justice qui participe à la mise en œuvre de la réforme de la police, estime pour sa part que la redevabilité devrait être intériorisée au sein de la Police nationale congolaise, à travers des mécanismes d’autodiscipline et de gouvernance.
Ce réseau a souligné la nécessité de renforcer le contrôle au sein des services et unités de la police, de manière à amener les policiers à utiliser à bon escient les biens de l’Etat mis à leur disposition. Il faudrait d’autre part que certaines structures internes en assurent le contrôle régulier, et dressent le rapport trimestriel ou annuel de la gestion de ces équipements et infrastructures. Cela n’est possible que dans la stricte observance des lois et textes réglementaires, le renforcement du rôle de l’Inspection générale de la police qui devrait effectuer l’évaluation des services de la police.
A travers ces différents mécanismes de contrôle interne, la Police nationale congolaise devait garantir le contrôle de gestion rationnelle de tout son patrimoine, afin qu’il soit mis au service de la communauté, aussi bien pour le maintien de la paix ou dans les opérations de rétablissement de l’ordre public.
Les vieilles pratiques tant décriées au sein de la police, ne peuvent être définitivement éradiquées que si l’on concrétisait la vision de la réforme de la police, en ce qui concerne la gestion des matériels, des équipements et autres infrastructures appartenant à la communauté nationale et mis à la disposition de la police.
La société civile qui est partenaire de la police dans le cadre des comités locaux de sécurité de proximité, aura un regard sur cette gestion et ne manquera pas d’émettre ses critiques au moment opportun.
J.R.T.