Régulation des flux téléphoniques- Félix Tshisekedi interpellé: l'État perd 17 millions de dollars chaque mois (rapport officiel)

Lundi 4 février 2019 - 09:16
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Les premières indications sont claires. Grâce aux données fournies par des organes internationaux de référence qui attestent des flux des opérateurs et les travaux des entreprises techniques de la téléphonie mobile de chaque pays dans le monde, les services gouvernementaux ont pu avoir une vision plus objective sur les flux téléphoniques au Congo-Kinshasa. Elles confirment des incohérences de déclarations laissant supposer un système de fraude généralisée.

Les services du ministère des PTNTIC viennent de recevoir les premiers états de contrôle : les faits sont alarmants. Le système déclaratif autorise toutes les fraudes et les omissions. Les opérateurs n'ont pas fait toute la clarté sur l'état du trafic. Comme l'indiquait déjà un précédent rapport : une perte de 17.6 millions de dollars par mois !

Le Ministère a obtenu des informations sur le flux généré par les opérateurs en RDC. Il demeure constant que les cartes prépayées représentent plus de 96% de la consommation des abonnés soit entre 3 millions et 13 millions de personnes en fonction de l'opérateur. « Chacun sait que ces cartes prépayées sont toujours limitées dans le temps. N'arrive-t-il pas à tout un chacun d'acheter une carte et de ne pas l'utiliser entièrement, ou parce que le délai d'utilisation est expiré ? », explique un cadre du secrétariat général des PT NTIC. A ces recettes s'ajoutent encore d'autres flux à forte valeur ajoutée non déclarés dans le rapport bimensuel envoyé par chaque opérateur.

A ce jour, les opérateurs ne déclarent seulement que les communications effectives (c'est à dire, les appels, les sms ou linternet utilisés par le client) alors qu'ils encaissent la totalité du prix payés par les consommateurs. Ce manque à gagner se chiffre en millions de dollars et provoque des retards dans l'installation des infrastructures pourtant nécessaires au pays. Cette situation doit cesser !

Il apparait des bizarreries dans certains décomptes mensuels, avec des calculs en Francs Congolais (FC), qui représente des montants conséquents, qui, ses montants traduits en USD laissent perplexe. Exemple, un opérateur déclare un chiffre d'affaires internet mensuel de 88 millions de FC, qui avec un FC à 1 632 USD qui donne un chiffre d'affaire denviron 54 000 USD, chiffre d'affaire assujettis à la redevance internet de 3% - Ce qui donne au final une recette net pour l'État d'environ 1 600 USD, ce qui pour un grand opérateur national, comptant des dizaine de millions de clients abonnés nous semble inimaginable, irréel voir inconséquent.

Autre bizarrerie, un grand opérateur déclare sur un mois deux fois moins de trafic qu'un homologue de même taille sur le même mois. Partageant grosso modo le même nombre dabonnés. Statistiquement cela semble étrange, et représente pour l'État des recettes non perçues, avec un manque à gagner pouvant représenter plusieurs millions de USD par mois.

Les prétendues 27% de hausse de taxes et 60% de prix de l'Internet sont des gros mensonges. Il ne doute pas que les opérateurs sauront revenir à de plus justes proportions et à apporter un service de qualité au plus juste prix.

Depuis une quinzaine d'années, en effet, la volumétrie des données n'a pas du tout varié. Les opérateurs déclarant des pertes et des déficits. Ceci est dautant plus incohérent qu'il est facile de constater que l'offre en équipements : smartphones, tablettes, s'est particulièrement développée.

La question que l'on peut se poser est celle de savoir si « Faut-il voir derrière les rumeurs qui circulent, des manoeuvres pour retarder le bon fonctionnement de la régulation et la volonté de certains de vouloir échapper au contrôle et à une plus juste taxation ?

Pour stopper cette anarchie, le Gouvernement de la République, par une décision souveraine, avait choisi de sous-traiter une partie des prestions de l'Autorité de Régulation de la Poste et Télécommunications (ARPT) à une firme internationale disposant de l'expertise dans le domaine de contrôle des activités des entreprises des télécommunications.

Un choix confirmé par ses services pour permettre une plus juste évaluation de la volumétrie des données. Pour Emery Okundji, cette démarche n'a rien d'exceptionnel. Tous les pays de la sous-région ont eu la volonté de s'entourer des compétences techniques et technologiques des professionnels privés spécialisés pour disposer d'une meilleure visibilité des recettes colossales générées par les opérateurs de téléphonie mobile et d'Internet. Cela est d'autant plus justifié qu'au regard de la haute technicité de ce secteur, les équipes gouvernementales n'ont pas de compétences requises ni des équipements appropriés.

Et c'est dans le contexte de la modernisation des télécommunications et des NTIC qu'a été prise cette décision gouvernementale. Le système de contrôle précédent et portant sur la lutte contre la fraude des communications internationales entrantes, installé par une firme française, avait failli par manque de suivi et par la corruption de certains hauts fonctionnaires.

Il est clair que cet échec avait eu des impacts négatifs sur l'économie nationale puisqu'il n'avait pas permis à l'État d'encaisser les revenus supplémentaires dont devraient s'acquitter les 4 opérateurs et les recettes nécessaires au bon développement du pays provenant de la taxe de terminaison.

Mais malgré cette avancée, les opérateurs véreux ont monté un coup et peut-être ils peuvent se frotter les mains davoir tenté pour la énième fois d'échapper au contrôle des flux téléphoniques. Ils se réjouissent, toute honte bue, d'avoir obtenu, malgré la décision du gouvernement prise lors d'un conseil des ministres présidé par l'ancien chef de l'État, Joseph Kabila, la résiliation du contrat avec la société African General Investment Limited (AGI) chargée de contrôler les flux téléphoniques déclarés par les opérateurs des télécommunications.

La décision annoncée par le vice-premier ministre de l'intérieur, Henry Mova Sakanyi a l'issue de la réunion interinstitutionnelle a étonné plus d'un. Pourtant, la question avait été tranchée. Aussi bien l'État congolais s'est décidé de profiter de ses minerais, autant dans le secteur des télécommunications, il doit être mis fin à l'évaporation des recettes, explique un expert des Télécoms.

Voilà pourquoi il avait été décidé ce contrôle de flux téléphoniques pour arrêter la fraude et les détournements dans les Télécommunications. Le Ministre des PT NTIC, Emery Okundji avait signé un arrêté officialisant le contrôle des flux téléphoniques ( voix, sms et données).

Pour Emery Okundji, il faut rétablir la vérité des faits. Le Ministre des PT NTIC reste de marbre et réaffirme la position du Gouvernement : faire la chasse aux fraudeurs et mobiliser les recettes indispensables au bon développement du pays. Une manière de decrier le manque de transparence des opérateurs.

D'après Alain Kalombo, un expert des Télécoms, le chiffre d'affaires potentiel des opérateurs se calcule sur les nombres d'appels téléphoniques, d'envoi de SMS, d'utilisation d'Internet par les messageries Yahoo, Gmail, les comptes professionnels et les échanges par Whatsapp, Facebook, Twitter, Instagram.

Cela représente des millions de clients par opérateur, soit près de 40 millions de personnes. Mais curieusement, aujourdhui, quand les services publics habilités demandent les détails permettant dévaluer la taxe (une sorte d'impôt sur les gains), les opérateurs transmettent un document synthétique d'une seule page indiquant le résultat des appels passés dans le pays et à linternational, et des sms et sans en donner des détails. Ce qui paraît déjà suspect et doit interpeller toutes les bonnes consciences.

Aucune distinction n'est faite entre les entreprises et les particuliers. Pourtant, cela est très fondamentale. En effet, ajoute l'expert, ces deux types de clients ne génèrent par les mêmes recettes. A bien scruter, on se rend compte que ce manque de visibilité de la transmission des données est une volonté très claire des opérateurs de téléphonie de dissimuler leurs revenus au préjudice de l'État.

CP/ Kalombo Muteba, expert en télécom