
New York, septembre 2025 - La République Démocratique du Congo (RDC) a une nouvelle fois porté devant les Nations Unies le lourd fardeau d’un conflit trop longtemps négligé. À l’occasion de la 80e session de l’Assemblée générale de l’ONU, le président congolais , Felix Tshisekedi a pris la parole pour briser le silence qui entoure l’une des plus grandes tragédies humanitaires du XXIe siècle : la guerre de l’Est et ses millions de victimes.
Depuis plus de trente ans, le Congo subit une succession de violences armées, alimentées par les ambitions économiques, les rivalités géopolitiques et l’inaction de la communauté internationale. Ce n’est plus seulement une crise nationale : c’est un scandale moral et politique mondial.
Une guerre qui dure, un génocide ignoré
Dans son discours, le président congolais a mis en lumière un fait que beaucoup tentent encore d’occulter : ce qui se passe à l’est du pays relève de crimes de masse, systématiques, planifiés – en d'autres termes, d’un génocide. Pourtant, contrairement à d’autres tragédies internationales qui mobilisent l’opinion publique et les chancelleries, la souffrance congolaise reste marginalisée, comme si elle appartenait à un monde invisible.
La RDC ne se contente plus de dénoncer : elle exige que la vérité soit reconnue, que les faits soient nommés, que les responsables soient identifiés. À ses côtés, des organisations comme le FONAREV (Fonds National de Réparation pour les Victimes) ont plaidé à New York pour une reconnaissance officielle des atrocités commises contre les populations congolaises depuis les années 1990.
M23, Rwanda et complicité silencieuse
Parmi les acteurs clés de cette tragédie, le mouvement rebelle M23 continue d’occuper illégalement des territoires dans les provinces du Nord-Kivu. Ses exactions sont connues, documentées, condamnées. Mais ce groupe ne fonctionne pas seul. Il bénéficie d’un appui extérieur direct, en particulier de la part du Rwanda, comme l’ont confirmé de nombreux rapports d’experts des Nations Unies.
Et pourtant, malgré ces preuves accablantes, aucune mesure significative n’a été prise contre le régime de Kigali. Les dénonciations internationales se succèdent, mais elles restent creuses, sans volonté politique ni sanction réelle. On dénonce dans les couloirs de l’ONU ce que l’on tolère dans les coulisses diplomatiques.
Cette duplicité aggrave le sentiment d’abandon ressenti par les Congolais : leur pays est attaqué, leurs terres sont occupées, leurs enfants massacrés, mais aucune coalition internationale ne se lève pour les défendre.
Une voix qui dérange dans l’Assemblée
Dans l’hémicycle onusien, l’intervention du président congolais a été claire, directe, sans compromis. Il a lancé un appel à la communauté internationale : cessez de détourner le regard. Car derrière chaque discours creux, chaque report d’action, ce sont des vies humaines qui s’éteignent dans l’anonymat.
La RDC ne cherche pas la pitié. Elle réclame le respect du droit international, la reconnaissance de la vérité historique, et surtout, la fin de l’impunité dont jouissent encore ceux qui orchestrent ces violences. La justice ne doit pas être à géométrie variable selon les intérêts des puissants.
L’ONU face à ses contradictions
L’institution qui devait incarner la paix mondiale est aujourd’hui confrontée à son propre échec en République Démocratique du Congo. Après des décennies de présence sur le terrain, la MONUSCO s’apprête à se retirer, laissant derrière elle un pays toujours en guerre, un peuple encore meurtri, et une paix toujours hors de portée.
Les promesses n’ont pas été tenues. Les rapports se sont empilés sans conséquences. Les crimes ont été dénoncés, mais rarement jugés. En quittant le Congo, l’ONU laisse une impression d’abandon, voire de capitulation face à des acteurs qu’elle refuse d’affronter.
Un appel à l’action, pas à la compassion
Ce qui est demandé aujourd’hui par la RDC et les organisations comme FONAREV, ce n’est pas un élan de compassion temporaire. C’est un changement de cap, une refonte des priorités internationales.
Il faut :
Mettre en place un mécanisme de justice internationale spécifique pour les crimes commis en RDC ;
Sanctionner les États qui soutiennent activement les groupes armés ;
Et établir une commission vérité pour documenter et reconnaître officiellement les violences subies par le peuple congolais.
Conclusion : L’Histoire retiendra
L’Histoire jugera ceux qui ont su, mais qui n’ont rien fait. Le Congo continue de crier dans le désert, mais ce cri devient chaque jour plus fort. La justice attendue ne réparera pas les vies perdues, mais elle évitera que le cycle de violence se perpétue encore pour une autre génération.
Il est temps d’écouter enfin ceux qu’on a réduits au silence.
Eric Kamba
Analyste politique et géostratège