Après la publication, par la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante), du calendrier électoral global, les lignes auraient dû sérieusement bouger au niveau des états-majors politiques de la Majorité comme de l’Opposition. Hélas, la pré-campagne est constipée à la suite de plusieurs pesanteurs qui empêchent les virtuels candidats aux mandats électifs de s’exprimer en toute liberté.
Pendant que le pays s’achemine vers les élections locales, municipales, urbaines, législatives et présidentielle, dont l’organisation est confinée entre le 25 octobre 2015 et le 27 novembre 2016, l’on en est encore aux feuilletons d’arrestations arbitraires et détentions illégales de plusieurs leaders politiques et d’opinions, aux interdictions intempestives des réunions politiques ayant pour animateurs des membres de l’Opposition, aux fermetures illégales des médias accusés de tout et de rien, à la chasse aux sorcières au sein de la famille politique du Chef de l’Etat, etc.
Sous d’autres cieux, tous ceux et toutes celles qui se sentent la vocation de briguer un poste de Président de la République, de Député National, de Député provincial, de Sénateur, de Gouverneur de province, de Maire de ville, de Bourgmestre ou de Chef de Secteur entrent en campagne deux, trois, trois voire quatre ans avant les échéances électorales. Et, à deux ans des scrutins, comme c’est le cas présentement en RDC, les propos et gestes de certains acteurs politiques ne cachent rien sur leurs ambitions politiques.
Les candidats potentiels à la magistrature suprême ou à la députation nationale ne ratent aucune occasion pour attirer l’attention de l’électorat sur leur personne. Tout dernièrement à Paris, lors de la « marche républicaine » suscitée par l’assassinat des journalistes et caricaturistes de « Charlie hebdo », on a vu l’ancien Chef de l’Etat, Nicolas Sarkozy, jouer des coudes pour se positionner pratiquement à la même hauteur que le président en fonction, François Hollande, qui se trouvait en première ligne aux côtés de ses collègues chefs d’Etat d’autres pays.
A la même occasion, Marine Le Pen; présidente du Front National et virtuelle candidate à la présidentielle, était folle furieuse de l’exclusion de son parti de la liste des participants à cette manifestation. Depuis un temps, Sarkozy est présent au Parc des Princes lors des chocs entre le Paris Saint Germain et des clubs adverses (cas de mardi soir contre Chelsea). D’ailleurs, interviews, conférences, débats, réflexions, meetings, séminaires idéologiques, conclaves, congrès, élections primaires, alliances... s’enchaînent dans une ambiance de libre circulation des idées.
Le combat politique porte davantage sur les idées que la vie privée des candidats, même si certains n’hésitent pas à exhumer des faiblesses de la vie privée des autres, que tout le monde laisse à la justice le soin de régler, sans interférence. Malheur à quiconque commet l’erreur de présenter un projet de société décousu ou ayant déjà montré ses limites dans le passé.
Compte tenu de la possibilité laissée aux futurs candidats de parler, l’électorat se trouve largement renseigné sur les enjeux politiques, économiques et sociaux d’une course à la présidentielle ou à la députation nationale, de sorte que chaque électeur est appelé à se prononcer, le moment venu, dans les urnes, selon sa conscience.
Pourquoi a-t-on peur d’une pré-campagne?
En RDC, qui a peur de la pré-campagne? En principe, les candidats de la Majorité au pouvoir comme ceux de l’Opposition devraient se retrouver sur la ligne de départ avec les mêmes armes. Pour les premiers, il s’agirait de défendre les points positifs de leur gestion pendant les cinq ans de leur mandature. Si leur bilan est largement positif, leur réélection ne devrait poser aucun problème. Dans l’hypothèse d’un bilan négatif, ils devraient accepter d’assumer la sanction du souverain primaire et débarrasser la scène, en vue de tenter un come back plus tard. Quant aux candidats absents des institutions de la République pendant cinq ans ou plus, on ne peut pas leur demander de jeter des fleurs à ceux qui étaient aux affaires. Leurs discours devraient aller naturellement dans le sens la recherche des points les plus négatifs de la gestion des hommes au pouvoir. Gouverner autrement tel devrait être l’essentiel de leurs messages.
Est-ce un péché, dans une démocratie digne de ce nom, de voir l’Opposition rejeter en bloc le bilan de la législature sortante ? Pourquoi le refus de l’Opposition de reconnaître au pouvoir en place le moindre mérite dans l’analyse des dossiers sécuritaires, politiques, économiques et sociaux fait-il problème?
Les Congolais devraient-ils être conduits aux urnes, en 2015 et 2016, sans savoir comment la République a été gérée pendant cinq ans ? Vont-ils voter sans connaître les projets de société de ceux qui leur promettent monts et merveille, dans le cadre de l’alternance politique ? Si l’on veut que l’électorat congolais puisse donner ses voix aux hommes et femmes qui méritent réellement de piloter les institutions de la République de 2016 à 2021, on devrait libérer l’espace politique et permettre au public d’avoir la bonne information sur la marche du pays.
Kimp