Vendredi 12 juin 2015. Dans une salle paroissiale Notre Dame de Fatima prise d’assaut par les cadres du Front Social des Indépendants Républicains (Fsir) et près de deux cents agents et cadres de Lignes Aériennes Congolaises (Lac-sarl), Chérubin Okende Senga, président de ce parti politique membre de la Majorité présidentielle, anime un point de presse concernant l’affaire « Gestion et vente du terrain Air terminus de Lac ».
L’intéressé sort de sa réserve trois ans après le retrait de son mandat de cette entreprise du Portefeuille de l’Etat pour apporter des preuves visant à contrer des griefs lui imputés malencontreusement et au comité de gestion placé sous sa direction par la ministre du Portefeuille à la séance plénière du Sénat du mercredi 13 mai 2015.
Aux dires du communicateur de la Majorité présidentielle, ces accusations devant la Chambre haute du parlement et en direct sur les médias publics pendant cette période des enjeux politiques majeurs liés notamment au processus électoral en RDC, portent gravement atteinte à sa dignité ainsi qu’à sa notoriété publique.
Un défi national à relever
A sa nomination en janvier 2008 par ordonnance présidentielle, en qualité d’Administrateur directeur technique, Chérubin Okende sait que la partie ne sera pas facile. Le Président de la République qui juge inconcevable que la RDC puisse manquer une compagnie aérienne nationale digne de ce nom, est parfaitement conscient que «Lac» traverse une profonde crise affectant son exploitation, ses finances et son administration. Cette santé peu reluisante découle de mauvaises décisions prises tant au niveau du gouvernement que de la gestion de l’entreprise pendant les régimes précédents. Des décisions de nature à hypothéquer les intérêts de l’Etat en faveur des intérêts des prédateurs privés abusant de leur position privilégiée dans les institutions publiques et ayant juré de faire disparaître la compagnie aérienne nationale.
Fort de ces évidences, Chérubin Okende considère cette nomination comme un défi national à relever pour mériter de la confiance du Chef de l’Etat et de la Nation tout entière. Certes la situation désastreuse décrite ci-dessus pèse énormément, mais Lac dispose des atouts indéniables pouvant permettre l’assainissement de cette situation et d’amorcer la relance de ses activités.
C’est dans cet esprit que des actions audacieuses sont entreprises pour redresser la situation afin d’inscrire le transport aérien aux 5 chantiers de la République et de faire participer Lac à la révolution de la modernité. Force est de constater que la plupart de ces initiatives salutaires sont freinées ou anéanties par le manque de volonté politique soutenue du Gouvernement de la République.
Des perspectives concrètes et vérifiables
L’orateur du jour met en exergue des perspectives concrètes et vérifiables ci-après :
a) La signature et/ou le renforcement des accords commerciaux avec des compagnies aériennes internationales sur l’exploitation des droits de trafics moyennant paiement des royalties (Air Zimbabwe, Ethiopian Airlines, Brussels Airlines, Kenya Airways, South African Airways). Les recettes engrangées permettent d’éponger de nombreux découverts bancaires non remboursés depuis des années (BIC, BCDC, BIAC, FIBANK, etc.), d’entamer la paie des quotités de salaires du personnel et d’assainir les états financiers de l’entreprise, de réanimer les bases domestiques et quelques représentations extérieures dont Luanda et Lagos.
b) La négociation et la signature le 25 juin 2008 d’un mémorandum d’entente avec la société sud-africaine Equity Aviation Services pour l’acquisition des matériels performants de handling (assistance au sol) pour les aéroports de N’Djili (Kinshasa), de la Luano (Lubumbashi), de Bangboka (Kisangani), de Bipemba (Mbuji-Mayi), de Goma et de Kindu. Ce projet est anéanti par le Gouvernement de la République en faveur d’un projet illusoire de Rak-Airways, une société des Emirats Arables Unis.
c) L’acquisition sur fonds propres en début de l’année 2009 de l’unique Boeing 737-200 opérationnel de Lac qui vient de subir une révision technique générale à Perpignan en France. Il sied de noter le nombre réduit des vols opérés par cet aéronef par manque de fonds de roulement exacerbé par l’expiration des assurances et du certificat de navigabilité dans l’indifférence totale de l’Etat propriétaire, malgré les cris de détresse de l’équipe dirigeante. Et pourtant, cet avion a transporté les Léopards à Garoua, au Cameroun en 2009 et le TP Mazembe en finale à Tunis, en Tunisie en 2010.
d) La négociation et la signature le 30 juin 2009 d’un accord de partenariat avec SALENA s.a. société de droit luxembourgeois pour la création d’une société aérienne en partenariat public-privé, une joint-venture dénommée « RD Congo Airways » symbolisée par un Okapi volant. Lac devrait apporter au partenariat les ressources et expertises humaines à sélectionner prioritairement parmi ses agents et cadres, son réseau d’exploitation, le portefeuille des droits de trafics lui concédé par l’Etat congolais, ses infrastructures techniques et immobilières nécessaires à l’exploitation. Les engagements de Salena portent sur la mise à disposition du partenariat de 02 Airbus 330-200, 05 Boeing 737-700/800, 03 CRJ et 04 ATR 42, soit 14 aéronefs avec une couverture des frais d’exploitation de six mois. Dans le schéma de financement de la société luxembourgeoise sont intégrées l’acquisition des matériels et équipements de handling, la réhabilitation et la construction des complexes de catering, la modernisation du centre de maintenance et des ateliers techniques, la modernisation du centre de formation ainsi que celle du système de gestion, la relance de l’activité commerciale, la réhabilitation des bâtiments liés à l’exploitation et la construction de nouveaux hangars techniques. Ce business plan est évalué à USD 223.861.730,00 et la répartition des parts sociales à 51% pour Lac et 49% pour Salena s.a. Transmis au Gouvernement pour autorisation de la création de la nouvelle compagnie « RD Congo Airways » depuis le 03 juillet 2009, ce projet approuvé par le ministère des Transports et Voies de Communication, est bloqué et anéanti par le ministère du Portefeuille à travers le Copirep dans la perspective de privilégier le projet jamais réalisé de Rak-Airways piloté par Rakeen.
e) La négociation et la signature le 24 septembre 2010 avec la société « Aviation Industry Corporation of China » (AVIC) d’un accord commercial préconisant l’acquisition par Lac de 08 avions MA60 de fabrication chinoise, des pièces de rechanges, outillages et équipements de support, l’assistance technique, le convoyage et autres frais connexes ainsi que la reconversion pour un schéma de financement d’USD 157.000.000,00 de prêt auprès d’Exim Bank of China. Ce prêt est remboursable en 20 ans avec un délai de grâce de 05 ans, au taux concessionnel à fixer entre Exim Bank et le Gouvernement congolais dans la fourchette de 1 à 3% l’an. Ce projet est anéanti par la lettre du 20 juin 2011 du ministre des Finances.
f) La mainlevée du 03 décembre 2011 par l’entremise du ministère de la Justice et Droits humains, des saisies judiciaires opérées sur le patrimoine immobilier de Lac et la négociation amiable de plus de 50 dossiers de litiges judiciaires contraignants.
g) La négociation et la signature avec les syndicats du Protocole d’accord du 03 août 2011 portant sur l’assainissement de la dette sociale et la mise à la retraite légale et extra-légale de plus de 75% du personnel éligibles à la retraite, soit 1.222 agents et cadres. Ce compromis des parties, approuvé par le personnel, préconise l’effacement de 85% de la dette sociale (soit une décote d’USD 112.200.000,00) et le paiement de la dette résiduelle de 15% (soit USD 19.200.000,00). La poursuite de l’exécution de ce protocole d’accord est contrecarrée par le retrait de mandat depuis le 25 mai 2012.
Avis et considérations favorables de la hiérarchie du Gouvernement
Pour relancer l’exploitation et réaliser l’assainissement du personnel, le Conseil d’administration décide de l’aliénation du patrimoine immobilier de Lac non lié à l’exploitation et obtient les avis et considérations favorables de la hiérarchie gouvernementale dont le ministre du Portefeuille, le Vice-premier ministre chargé de l’Economie et Reconstruction, ministre des Postes, Téléphones et Télécommunications ainsi que du Vice-premier ministre, ministre des Postes, Nouvelles Technologies de la Communication.
Okende Senga signale qu’à la remise-reprise du 22 janvier 2008, l’inventaire du patrimoine de Lac dénombre plus de 60 propriétés non liées à l’exploitation dont la plupart sont menacées jusqu’à ce jour soit de spoliation, soit de saisies judiciaires, soit de confiscation pure et simple par certaines autorités. Les mandataires combattent, sans relâche, les confiscations sans contrepartie pour l’entreprise et son personnel, ainsi que toutes les formes de saisie et de spoliation. En menant des investigations sérieuses là-dessus, l’on ne manquera pas de découvrir que certains dignitaires du pays sont directement ou indirectement liés à ces actes illicites qui sont combattus énergiquement.
Pour revenir au processus de vente proprement dite, Lac respecte scrupuleusement les dispositions pertinentes de la Loi n°10/010 du 27 avril 2010 relative aux marchés publics. L’appel d’offres est lancé par la publication dans les journaux d’une sollicitation à manifestation d’intérêt pour la sélection des maisons spécialisées en expertise immobilière ainsi que l’avis au public pour annoncer au public la vente directe de certains immeubles de Lac-sarl. Une commission ad hoc est mise sur pied chargée de fixer les critères de sélection, d’organiser la sélection des maisons d’expertise, de déterminer les conditions de visite des sites, d’organiser la vente conformément aux dispositions légales en la matière. La vente est organisée sur base d’allotissements, toutes les modalités y afférentes strictement opérées suivant la loi. La RAWBANK remporte la mise à l’issue du dépouillement sur la vente de la parcelle Air terminus étant donné que son offre est économiquement la plus avantageuse.
Affectation judicieuse des fonds
Quant à l’affectation des fonds, le Conseil d’administration s’en tient strictement aux directives du Vice-premier ministre des PNTC et Premier ministre, soit 60% pour la dette sociale, 20% pour la relance de l’exploitation, 10% pour les négociations amiables avec des créanciers dans le cadre des dettes contraignantes et 10% pour les imprévus.
S’agissant des engagements pris par Okende comme ADG a.i. ceci découle de l’application des dispositions du règlement intérieur qui accordent l’intérim à l’Administrateur directeur technique en cas d’absence ou d’empêchement de l’ADG et de l’ADGA.
Chérubin Okende est relevé de ses fonctions par une simple lettre du ministre du Portefeuille pendant que sa nomination découle d’une ordonnance présidentielle. Ayant laissé plus de USD 2.000.000,00 dans les comptes de Lac, ses arriérés d’émoluments de USD 344.413,73 sont impayés jusqu’à ce jour. Okende précise avoir pris le soin d’en informer le Président de la République, le Président du Sénat, le Premier ministre et le Secrétaire général de la Majorité présidentielle. Si ces recours ne le réhabilitent pas dans sa dignité et sa notoriété politique, Okende instruira ses avocats pour des actions judiciaires appropriées.
Ya’EBENDE