En séjour médical à Bruxelles depuis le mois d’août 2014, Etienne Tshisekedi est fort sollicité tant par ses compatriotes de la diaspora que par ceux en provenance de la RDCongo, de passage par la capitale belge. Le dernier visiteur de marque en date n’était autre que Martin Fayulu, député national, président de l’Ecide, Coordonnateur des FAC (Forces Acquises au Changement) et de « Sauvons le Congo ». Partisan du « front du refus» de tout dialogue avec le Chef de l’Etat, Joseph Kabila, au motif que celui ci serait une énième distraction destinée à favoriser un glissement du calendrier électoral et partant des mandats des animateurs actuels des institutions de la République, cet acteur politique avait besoin de l’éclairage du président de l’UDPS par rapport à la position exacte de son parti. C’est ainsi qu’il a sollicité et obtenu une audience avec l’intéressé.
Conduit auprès de l’Opposant historique le samedi 11juillet 2015 par André Kabanda Kana, représentant de l’UDPS en Belgique, Martin Fayulu a échangé avec son interlocuteur pendant au moins 45 minutes, à l’Hôtel Montgomery. C’est le député national qui a ouvert les hostilités, sous forme d’inquiétudes que ressentent lui-même et plusieurs de ses partenaires de l’Opposition politique au sujet des stratégies de conservation du pouvoir mises en place par la Majorité Présidentielle, notamment à travers sa volonté de démarrer à tout prix le processus électoral par les élections législatives provinciales, les élections locales municipales et urbaines, alors que les contraintes politiques, juridiques, administratives, techniques et financières plaident pour leur renvoi au-delà de 2015. Fayulu a soutenu qu’il s’agit là d’un schéma visant à contrôler toute la territoriale avec des agents à acquis à la cause du pouvoir en place et provoquer des prolongations à l’étape de la présidentielle et des législatives nationales.
Le Coordonnateur des FAC a également fait part à Etienne Tshisekedi du rejet catégorique de la main tendue du Chef de l’Etat, Joseph Kabila, par ses alliés politiques, car convaincus que le dialogue en préparation serait initié dans le but de gagner du temps et de favoriser un glissement de son mandat. Il n’a pas non plus caché sa crainte de voir l’UDPS faire le jeu du pouvoir, en donnant l’impression de vouloir dire « oui » au’ dialogue prôné par le Président de la République.
En réponse aux préoccupations de son visiteur,’ Etienne Tshisekedi a indiqué que la position de son parti ne pouvait prêter à la moindre confusion, car fondée sur l’impératif d’un dialogue dont les termes de référence se trouvent clairement définis dans sa « feuille de route », rendue publique en février 2015, laquelle s’est largement inspirée du contenu de l’Accord- cadre d’Addis-Abeba, signé en février 2013 par la RDC et les Etats membres de la CIRGL (Conférence Internationale sur la Région des Grands Lacs). Le président de l’UDPS a rappelé à Fayulu que ce texte recommande une facilitation de la communauté internationale pour le dialogue entre congolais. Il a aussi souligné que c’est l’unique voie de sortie pour résoudre la crise de légitimité qui touche la RDC depuis novembre 2011 et organiser des élections réellement crédibles, démocratiques et transparentes dans un climat sécurisé et apaisé ainsi que dans les délais constitutionnels. Bref, il a levé l’équivoque au sujet d’un prétendu schéma de partage du pouvoir entre l’UDPS et la Majorité Présidentielle, derrière les dos des millions Congolais.
S’agissant de l’exigence du camp du refus du dialogue avec Kabila de s’investir dans une tripartite Majorité-Opposition-Ceni en vue de dégager un calendrier électoral consensuel, Etienne Tshisekedi a mis Fayulu et ses amis de la Dynamique de l’Opposition en garde contre toute collaboration avec la CENI, qui constitue, selon lui, le plus gros nœud de la crise congolaise et qui, à ses yeux, se retrouve aussi comme juge et partie dans cette autre forme de dialogue.
Le président de l’UDPS n’a pas mâché ses mots devant Fayulu et lui a fait savoir que toutes les forces du changement avaient intérêt à se fédérer autour de sa personne pour sortir la RDCongo de l’impasse et faire échec à un glissement dont le décor se trouve largement planté avec un découpage territorial précipité, un dialogue prédéfini, un calendrier électoral non consensuel, un fichier électoral non audité, une loi sur la répartition des sièges toujours en souffrance, etc.
On croit savoir qu’à l’issue de leurs entretiens, Etienne Tshisekedi et Martin Fayulu ont pu évacuer plusieurs zones d’ombres sur leur vision du dialogue et du processus électoral.
Par Kimp