La République démocratique du Congo s’engage dans un rivage très important dans le cadre de sa démocratisation, avec le troisième cycle des élections qui se pointe déjà l’horizon. Ainsi, l’ONG internationale de défense des droits de l’Homme, Human Rights Watch (RHW), se montre inquiète des répressions pendant la période électorale.
C’est ainsi que le directeur de cette ONG internationale, Kenneth Thomas, a débattu de cette question avec les autorités du pays, les responsables des organisations de la société civile et autres personnalités au cours de son séjour en RD Congo.
C’est dans ce cadre, qu’avant de quitter Kinshasa, il a animé une conférence de presse hier mercredi 22 juillet 2015 à la représentation de l’OSISA à Kinshasa, une autre ONG internationale de défense des droits de l’Homme située au quartier Socimat dans la commune de la Gombe. La chercheuse senior de RHW, Ida Sawyer, et le coordonnateur de l’ONG congolaise Association congolaise pour l’accès à la justice (ACAJ), Georges Kampiamba, ont aussi participé à cet échange.
D’entrée de jeu, le directeur exécutif de RHW a précisé qu’il a rencontré plusieurs personnalités congolaises, des défenseurs des droits humains ainsi lue quelques victimes de violations des droits de l’homme et les membres de leurs familles. Il a également rencontré les acteurs politiques, membres de la communauté diplomatique, chef de la MONUSCO et représentants du gouvernement congolais.
Tête-à-tête Kenneth Thomas - Joseph Kabila
Kenneth Thomas a eu, en suite, une discussion franche et productive, a-t-il souligné, avec le chef de l’Etat Joseph Kabila, à qu’il a exhorté de mieux gérer la période des élections et d’éviter d’aller à l’encontre de la Constitution afin de sortir grand après son départ du pouvoir, Il a fait savoir au président de la République les inquiétudes de son organisation sur les graves violations des droits humains dans le pays.
Dans ses rencontres, il a relevé que son organisation a observé certains progrès en ce qui concerne la lutte contre l’impunité et l’amélioration de la sécurité dans l’Est de la RD Congo, mais qu’elle est profondément préoccupée par le climat de répression à l’approche des élections.
Surtout que, pour lui, le peuple congolais a subi de graves violations des droits humains durant de longues années de conflits et des décennies de dictature. Des mesures ont même été prises pour mettre fin au conflit et renforcer le respect des droits humains. Raison pour laquelle, le directeur exécutif de RHW a parlé directement avec les représentants du gouvernement de ses inquiétudes, en ce qui concerne les graves violations des droits humains qui persistent et leur impact sur le peuple congolais.
Il a ainsi relevé « l’utilisation par les forces de sécurité d’une force excessive contre les manifestations à Kinshasa et dans d’autres villes ».
L’exemple flagrant des manifestations de janvier 2015 a été donné. Aussi pour lui, “ RHW a documenté les dérapages des membres de la Police nationale et de la Garde républicaine qui ont tué par balles au moins 38 personnes Kinshasa et 5 autres personnes à Goma. Des dizaines d’autres manifestants ont, été blessés, et au moins 5 personnes à Kinshasa ont été victimes de disparition forcée
Libérer les activistes des droits de l’homme et les prisonniers politiques
Il a fait allusion à plusieurs activistes des droits de l’homme détenus par les agents de l’Agence nationale de renseignements (ANR), notamment les membres de Filimbi pendant de longues périodes,’ sans accusation, sans pour autant les présenter devant un juge ni permettre de rencontrer des avocats, contrairement aux exigences de la Constitution congolaise et du droit international. Et de soutenir, « Certains activistes de Kinshasa et Goma ont même été frappés et de fois torturés en utilisant une technique s’apparentant au simulacre de noyage “. Le problème est qu’à ce jour, personne n’a fait l’objet d’une enquête ou de la moindre sanction pour ces graves violations.
Le directeur exécutif Kenneth Thomas a encore relevé que, “ d’autres éminents activistes et leaders des partis politiques sont toujours en détention, en butte à des accusations forgées de toutes pièces pour s’être exprimés contre les tentatives visant à permettre au président Kabila de rester au pouvoir au-delà de 2016 ».
C’est pour cette raison qu’il a appelé les autorités congolaises à libérer immédiatement et inconditionnellement les prisonniers détenus en raison de leurs opinions politiques ou de leur participation à des activités pacifiques. Parmi ces détenus, il a cité les noms de Fred Bauma et Yves Makwambala, le défenseur des droits humains Christopher Ngoy, Jean-Claude Muyambo, Ernest Kyaviro, Cyrille Dowe, Jean-Bertrand Ewanga et Vano Kiboko. Surtout que pour HRW, libérer ces personnes est nécessaire si le gouvernement souhaite démontrer son sérieux quant à la tenue des élections crédibles et à son respect des droits humains.
Exhumer les corps dans la fosse commune de Maluku
Le directeur exécutif de HRW a, en outre,’ soutenu avoir exhorté les autorités congolaises à exhumer les corps enterrés dans la fosse commune de Maluku, dans la périphérie de Kinshasa. Il a fait savoir les inquiétudes de nombreux Congolais sur des personnes tuées par les forces de sécurité qui pourraient se trouver parmi les corps inhumés dans cette fosse commune.
Le numéro un de HRW a même rencontré plusieurs membres de familles qui ont déposé une plainte conjointe auprès du procureur général de la République, demandant que justice soit rendue et qu’une enquête crédible soit menée sur la fameuse fosse commune. Et de renchérir, « ces personnes m’ont expliqué que leurs proches avaient été abattus ou victimes de disparition forcée au cours des manifestations de janvier dernier à Kinshasa, ou durant l’opération Likofi ».
Entre-temps, HRW demeure préoccupé par le manque de progrès concernant la traduction en justice des individus responsables de graves violations des droits humains durant “l’opération Likofi ».
A ce sujet, Kenneth Thomas a appelé les autorités congolaises à mener des enquêtes et des poursuites appropriées contre les membres des forces de sécurité responsables dé ces graves violations. Il a rappelé le cas du général de la Police nationale congolaise qui a été aux commandes de l’Opération Likofi “, et devrait être suspendu immédiatement dans l’attente d’une enquête exhaustive sur sa responsabilité de commandement pour violations commises.
Le directeur exécutif de HRW, Kenneth Thomas, a abordé également la situation dans l’Est de la RD Congo.
Il a reconnu des progrès réalisés jusque-là par le congolais, en coopérant notamment avec la Cour pénale internationale (CPI). La grande majorité des individus responsables de graves violations dans l’Est de la RD Congo demeurent impunis, regrette-t-il. Sans oublier, des dizaines de groupes armés toujours actifs dans l’Est du pays et de nombreux hauts commandants avec de lourds passés de violations des droits humains qui demeurent en liberté.
Par Lucien KAZADI TSHIBAMBE