Dialogue : le procès en usurpation du statut d’Opposant fait à l’Opposition Républicaine (OR) est-il justifié ?

Mercredi 31 août 2016 - 06:55
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Qui est opposant et qui ne l’est pas ? Voilà la querelle byzantine qui occupe la frange de l’Opposition qui a décidé de participer au dialogue politique. S’ils étaient bien avisés, en s’inspirant notamment de l’adage qui dit que l’union fait la force, les opposants (pro-dialogue) n’allaient pas s’arroger indûment le droit de délivrer le certificat d’opposant à telle ou telle autre personnalité de cette famille politique. Hélas c’est trop leur demander ! Cette attitude irresponsable fragilise cette opposition pro-dialogue déjà mal vue par l’opposition anti-dialogue (Rassemblement et MLC). Comme si cela ne suffisait pas, alors que l’Opposition se divise sur qui est vrai opposant et qui ne l’est pas, la Majorité présidentielle a fait montre d’une unité et d’une discipline exemplaires lors des travaux du comité préparatoire. Question : l’Opposition a-t-elle le droit de se diviser à l’heure où les enjeux politiques recommandent son unité. Si elle ne remet pas en cause, sa voix ne sera ni forte, ni crédible pour être entendue. Elle sera laminée lors du dialogue par la majorité présidentielle.

Le procès en usurpation de la qualité d’opposant est fait notamment à l’Opposition Républicaine (OR) dont l’autorité morale est le président du sénat Léon Kengo. Mais pas qu’à lui bien qu’au cours de cette analyse nous allons nous focaliser sur uniquement l’OR. Pour certains opposants, le fait que l’OR soit dans les institutions, particulièrement au gouvernement, la plateforme ne peut pas appartenir à l’Opposition.

Pour être opposant, que dit la loi ?

Est-ce vrai ? Interrogeons la loi portant statut de l’Opposition Politique du 04 décembre 2007. Une lecture isolée de l’article 4 qui dispose que « est réputé avoir renoncé au statut de l’Opposition politique, le parti politique ou le regroupement politique qui accepte de partager les responsabilités de l’Exécutif aux niveaux national, provincial, urbain, municipal et local », semble donner raison aux censeurs de l’Opposition. En revanche, la lecture de l’article 14 en son alinéa 4 est là pour rappeler qu’exceptionnellement ont peut garder son statut d’opposant et faire partie du gouvernement. C’est le cas notamment de gouvernement dit de cohésion nationale ou encore de gouvernement dit d’union nationale dont la mission est de mettre fin à une grave crise politique. Au nom de l’intérêt supérieur de la nation, l’opposition peut entrer au gouvernement sans perdre son statut. Tel est le cas de l’Opposition Républicaine de Kengo qui est entrée en novembre 2014 au gouvernement à l’issue des Concertations Nationales de 2013 dont le but était de mettre fin à la grave crise politique que traversait la RDC à l’issue des élections controversées de 2011. Pour mettre fin à cette grave crise électorale, tous les acteurs politiques de l’opposition ainsi que la communauté internationale avaient préconisé le dialogue. C’est ainsi que de manière solennelle, l’Opposition organisa le Conclave de Limete en 2012 pour réclamer un dialogue afin de trouver une solution à la crise. Les Concertations nationales eurent lieu en 2013. Et une de leurs résolutions, était la mise sur pied d’un gouvernement de cohésion nationale pour mettre fin à la crise de légitimité. C’est ainsi que l’OR se retrouva au gouvernement. Bien qu’étant au gouvernement, l’OR ne s’identifia pas à la Majorité présidentielle. Elle n’y a jamais adhéré car jalouse de son statut d’opposant.

Kengo a assumé pleinement sa qualité d’opposant, actes à l’appui

Et ce statut l’OR l’a assumé pleinement. D’abord en septembre 2014 lors de la rentrée parlementaire. Ayant eu vent des velléités de réviser la constitution, le président du sénat délivra un discours magistral qui démontra l’absurdité de la démarche. Il s’attira aussitôt les foudres du pouvoir. Critiqué par le régime, le président de l’UFC (Union des Forces du Changement) resta de marbre et ne changea point sa position. Ensuite, vint janvier 2015, lors des émeutes sanglantes qui éclatèrent à Kinshasa pendant 3 jours pour protester contre la nouvelle loi électorale. Léon Kengo marqua une fois de plus sa désapprobation avec le pouvoir dans sa répression des manifestants. Il se désolidarisa du gouvernement en amendant profondément la loi querellée au cours d’une séance plénière du sénat restée mémorable dans l’opinion. Séance qui avait tenu toute la République en haleine. Satisfaite de la nouvelle loi électorale amendée par le sénat, la jeunesse avait chanté la gloire de Kengo pour cet acte républicain.  Avec ces deux faits historiques, l’OR est fondamentalement dans l’opposition malgré sa participation au gouvernement de cohésion nationale. Plutôt que de vouloir lui dénier la qualité d’Opposant, ses détracteurs feraient mieux de travailler à l’unité de toute les Oppositions car l’Opposition est plurielle. Cependant, de manière générale cette opposition bien que plurielle est d’accord notamment : sur le respect de la Constitution, sur la notion de l’alternance, sur le respect des droits humains et sur la séquence des élections. Plutôt que d’exacerber les rivalités, les opposants pro-dialogue gagneraient à mettre l’accent sur ce qui les unit plutôt que  sur ce qui les divise. Il y va là de l’intérieur supérieur de la Nation.  La bible ne dit-elle pas qu’une maison divisée contre elle-même ne peut subsister ?