L’Etat aligne trois cabinets d’audit pour percer l’énigme de l’or noir de la RDC

Jeudi 16 juillet 2015 - 10:54

Voilà qui rappelle la révisitation des contrats miniers qui n’aura, en réalité, accouché qu’une petite souris. Matata s’essaie cette fois dans l’or noir. Un secteur où l’un de ses prédécesseurs, Gizenga fundji, quoique auréolé de ses attributs «nationaliste, Lumumbiste, ferme, yandi vé » a pourtant jeté l’éponge. Le ministre de l’Economie, Bahati Lukwebo, faisant office de porte-parole de la troïka économique du gouvernement, a fait savoir, lundi 13 juillet 2015, que trois cabinets d’audits, sans les citer nommément, vont mener, sur toute l’étendue du territoire national, l’audit des entreprises pétrolières.
Après des timides remous du temps de 1+4, la décision du gouvernement de la RDC d’initier un audit sur les sociétés pétrolières a derechef été relancée en mai 2012 par le Premier ministre, Matata Ponyo. Il nous revient que ce serait un audit fonctionnel et financier des sociétés pétrolières installées en R-dCongo. Toutefois, la future loi sur les hydrocarbures ne serait pas en mesure d’arrêter la corruption ou les dommages environnementaux, affirme l’ONG Global Witness.
Cette loi a déjà été adoptée par le Sénat mais est restée sans suite à la chambre basse du parlement, l’Assemblée nationale. De l’avis des experts, elle contiendrait de nombreuses imperfections pouvant entraîner une mauvaise gestion de la richesse pétrolière du pays avec de graves répercussions sur l’environnement.
Pourtant, le Premier ministre, Matata Ponyo, s’est révolté, du haut de la tribune de l’Assemblée nationale lors de la présentation de son plan quinquennal, du fait que, depuis 1970, la production du pétrole stagne en dessous de 30.000 barils/jours.

Cela est aussi curieux que les atermoiements observés dans toutes les sphères politiques pour l’adoption et la promulgation du nouveau code des hydrocarbures. A ce jour, c’est une loi coloniale mêlant pêle-mêle mines et hydrocarbures qui régit le secteur pétrolier. La dernière fois qu’elle a été amendée remonte à 1981, il y a 34 ans. Matata tient à accélérer le processus de la promulgation de cette nouvelle loi. Le Premier ministre, sans avancer une date précise comme dans les autres secteurs, dit vouloir restructurer les entreprises publiques du secteur des hydrocarbures. Présentent, il n’y a en réalité qu’une seule entreprise publique, la Congolaise des hydrocarbures, COHYDRO ex-PETRO-CONGO. La SOCIR de Muanda, société d’économie mixte, n’existe plus selon un rapport du COPIREP, ses actifs ont été repris par X-OIL qui auraient racheté les 50% parts des Italiens d’ENI avec un montant de USD 2.500.000 alors que la valeur assurée de la raffinerie était chiffré à USD 91.000.000, selon l’expert r-dcongolais du secteur, le Prof José Bafala. La partie raffinerie de la SOCIR (nom repris encore par l’Etat) ne ronronne plus depuis 1998. L’entreprise ne vivote plus que du transport et du stockage des produits raffinés. S’agissant de COBIL, Bafala qui fut également Dircaba de l’ancien ministre des Hydrocarbures, Célestin Mbuyu, indique « qu’elle est placée sous une gestion non encore bien définie… ». Et de poursuivre « à notre connaissance, la RDC reste le seul pays au monde avec deux entreprises nationales et concurrentes en plus». Autre entreprise au statut trouble, SEP, Service aux entreprises pétrolières. Entreprise d’économie mixte dont les racines remontent du temps colonial en 1910. Les parts de l'Etat congolais dans l'actionnariat de SEP-CONGO sont détenues par la COHYDRO. Le reste de l'actionnariat est partagé entre six autres actionnaires, soit 63,4 % des parts dont l'actionnaire le plus important est ARISTEA. Autre entreprise à problème, FINALOG. Elle existe depuis des années mais méconnue du grand monde, même des opérateurs économiques du secteur des hydrocarbures. FINALOG est, en effet, le juste reflet de la gestion du secteur pétrolier r-dcongolais pour lequel cet expert ancien de la COHYDRO et la SOCIR, note dans un ouvrage qu’il a lu sur un document officiel «du pétrole américain produit en DRC, Zaïre » sans trop comprendre de quoi il s’agit.

FINALOG est, en effet, une entreprise mixte qui gère les pipelines qui emmènent du carburant depuis Ango-Ango, au sortir de Matadi à Kinshasa. L’Etat y dispose de 40% des parts et les firmes internationales TOTAL et ENGEN notamment se partageant le reste. Mais voilà 6 ans -depuis l’Assemblée générale ordinaire de cette entreprise qui a eu lieu en novembre 2009- que l’Etat r-dcongolais a oublié de nommer, même à titre intérimaire, quidam pour occuper le poste d’ADGA au sein de FINALOG. Toute bonne conscience se chercherait naturellement à savoir combien gagne l’ADGA et qui a donc perçu son salaire jusqu’à ce qu’en ce mois d’octobre courant, la ministre du Portefeuille découvre, comme par un heureux hasard, en feuilletant, apprend-on, les statuts de SEP et FINALOG que l’Etat a droit de nommer un ADGA au sein de la firme. Selon les chiffres fournis par FINALOG au Portefeuille, apprend-on, la société parapublique aura réalisé quelque USD 10.800.000 des chiffres d’affaire en 2013, plus de USD 8.000.000 de marge brute et de résultat opérationnel de près de USD 4.000.000. Chaque mois, FINALOG reçoit de SEP à qui elle fait louer ses pipelines qui sont d’une capacité combinée de 1.400.000m3/an pour plus de USD 620.000, nettement USD 622.666.
Voilà qui a attiré l’attention des autorités de tutelle, renseignent nos sources. D’autant plus que les pipelines sont dans un état fort préoccupant à tel point que le gouvernement a finalement levé l’option de construire un nouveau pipeline à court terme. Sur instruction du gouvernement, le ministre des Hydrocarbures Crispin Atama, a déjà lancé un avis à manifestation d’intérêts pour le recrutement en vue de l’étude de faisabilité d’un pipeline dont le point de départ est le port maritime de Banana et le point de livraison, le terminal de Kinshasa en passant par Ango-Ango. « Cette infrastructure, dixit le ministre des Hydrocarbures, représentera le moyen le plus sûr, le plus fiable et rapide pour transporter des volumes élevés des produits finis c-à-d essence, gasoil…kérosène». Les statistiques montrent que les estimations des volumes à transiter annuellement, fait comprendre Crispin Atame, seront de 1 million de m3 tous les produits confondus dans un premier temps, et de 3 millions de m3 à l’horizon 2020. Il va sans dire qu’une nouvelle entreprise de logistique des produits pétroliers verrait jour dans moins de 5 ans.
Mme Munga Mesozi, évoquant la défectuosité des infrastructures d’acheminement et de stockage des produits pétroliers, juge fallacieuse, l'insuffisance des moyens financiers (devant couvrir les différentes charges) avancée par les coactionnaires privés. Cette situation empêche l'Etat r-dcongolais, soutient la ministre du portefeuille, de disposer d'un pouvoir de contrôle et de suivi des activités de FINALOG à l'instar de SEP CONGO. Et pourtant, l’Etat r-dcongolais dispose, renseigne-t-on, de 36% des parts dans SEP et 40% dans FINALOG. L'Etat actionnaire pourrait demander un audit spécifique dans les entreprises précitées et dont les conclusions permettront au gouvernement de prendre des décisions idoines. D’ores et déjà, la ministre du Portefeuille voudrait que les experts du gouvernement établissent fut-il à titre provisoire les estimations sur la quote-part à prendre en charge par la structure des prix des produits pétroliers.
Certes, la mise en œuvre du schéma de l'amélioration de la capacité des infrastructures actuelles de transport et stockage des produits pétroliers doit se faire dans un bref délai, en compagnie des autres actionnaires, mais Munga tient à ce qu’il soit acté que la solution définitive préconisée pour cette question d'infrastructures de transport et de stockage, reste la construction d'un nouveau pipeline.
POLD LEVI