
Plus de 18 villages habités par les Banyamulenge dans la localité de Bibokoboko, territoire de Fizi au Sud-Kivu, ont été détruits par les Maï-Maï du mercredi 13 au vendredi 15 octobre 2021. Des vaches qui constituent l'unique economie de cette communauté ont été tuées. Il y a eu des blessés et des morts. Plusieurs personnes dont on ignore les chiffres exacts à ce stade ont été prises en otage par les assaillants.
Au cours d'un point de presse organisé à Kinshasa le mardi 19 octobre 2021, le député national Moïse Nyarugabo Muhizi s'est dit inquiet de constater le silence du gouvernement et d'autres institutions du pays sur ces faits qui, selon lui, s'inscrivent dans le cadre de la poursuite du projet d'extermination de la communauté Banyamulenge.
"Qu'est ce qui se passe? Qu'est ce que ce peuple a bien fait contre le bon Dieu ? Mais alors, le silence du gouvernement, le silence des institutions. Même pas un seul communiqué ! Pendant que tout se passait à Bibokoboko, le vendredi dernier, le gouvernement s'est réuni. Dans le compte-rendu, on a dit que tout est calme sur toute l'étendue de la République. Ils ont juste parlé un peu naturellement de Bunia et de Beni parce que là, il y a des routes, des avions et la communauté internationale suit ce qui se passe. Alors que dans les hauts et moyens plateaux, c'est derrière le rideau. C'est silence radio. On opère un génocide, on extermine dans le silence", a-t-il dénoncé.
L'élu du Sud-Kivu se dit déçu de voir le retard avec lequel les forces régulières sont intervenues. Ils rapportent que les militaires Congolais sont arrivés sur le lieu en petit nombre (une vingtaine) la journée de jeudi avant de décrocher faute d'effectif. Ce qui, pense-t-il, donne matière à réflexion sur la légèreté avec laquelle le gouvernement congolais et les autres institutions du pays prennent cette affaire.
"Si les autorités ne sont pas convaincues par mes mots, qu'ils descendent sur terrain pour démentir ce que je suis en train de dire, pour voir si Bibokoboko est habité, si les 18 villages sont habités, si les populations sont tranquilles et vaquent à leurs occupations, si des milliers de vaches qui constituent l'economie de cette communauté sont encore là. Si elles ne font rien, elles devront en répondre un jour. Ces vies humaines ne peuvent pas continuer à être fauchées et que personne n'en réponde", a-t-il martelé.
Pour, Moïse Nyarugabo, il est plus qu'urgent pour le gouvernement congolais de mettre fin à ce projet "diabolique" d'exterminer les Banyamulenge qui, a-t-il indiqué, n'ont pas choisi devant le bon Dieu de l'être. Comme lors de ses sorties médiatiques passées, ce juriste plaide pour des actions militaires d'envergure afin d'éradiquer ces groupes armés locaux et étrangers qui sèment la terreur dans cette partie de la RDC.
Contrairement à ce qui se raconte pour justifier l'inertie des autorités, a-t-il souligné, ce qui se passe dans les hauts et moyens plateaux du Sud-Kivu n'a rien à voir avec une guerre ethnique. Moïse Nyarugabo demande par ailleurs au gouvernement de démentir officiellement des rumeurs qui donnent les Banyamulenge pour des étrangers entretenant le projet de balkanisation de la RDC.
"Je demande au gouvernement de mener des opérations systématiques pour mettre fin à tous ces groupes armés qui pullulent, qui tuent. La deuxième chose que je demande au gouvernement, c'est de se prononcer sur des questions devenues un fonds de commerce du génocide. Des gens disent que les Banyamulenge sont des Rwandais, des étrangers, des comploteurs, qu'ils doivent rentrer chez eux. Comme si la question de la nationalité doit être gérée par les Maï-Maï et les communautés. Côté gouvernement, silence radio. On veut faire croire à l'opinion que cette communauté minoritaire qui vit dans les montagnes avec leurs vaches veut préparer la balkanisation et tout le monde garde silence. C'est comme si on a donné à ces Maï-Maï et les groupes armés Burundais, par sous-traitance, la mission de défendre la souveraineté de l'État. Je pense que le gouvernement doit se réveiller et prendre ses responsabilités", a-t-il plaidé.
Un autre fait qui inquiète l'élu du Sud-Kivu est l'indifférence du gouvernement central, du gouvernement provincial et d'autres institutions du pays sur les personnes prises en otage par les assaillants lors de ces récentes attaques. Il affirme que les contacts ont été établis avec ces groupes armés qui exigent d'importantes sommes d'argent pour les libérer.
Rappelons que ce phénomène de destruction des villages habités par les Banyamulenge dans les hauts et moyens plateaux du Sud-Kivu a commencé depuis 2017. Selon Moïse Nyarugabo, plus de 500 personnes ont été tués jusque-là. Plus de 500 villages ont été détruits. Les assaillants ont tué et volé plus de 480 têtes de vaches à ce jour. Il souligne que plus de 80% des Banyamulenge vivent actuellement dans les camps des déplacés dans les pays voisins.
Orly Darel Ngiambukulu