Jacques Djoli : « Il n‘y a pas d’alternative au respect de la Constitution »

Lundi 4 avril 2016 - 10:18
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MLC jusqu’au bout, le sénateur Jacques Djoli n’attend pas se dédire. Bien au contraire. Dans un entretien avec Le Potentiel, le sénateur est longuement sur le respect de la Constitution qu’il juge non négociable.

 

Avez-vous un commentaire sur la tenue de l’élection des gouverneurs dans les nouvelles provinces démembrées?

 

Sur le plan des principes, il faut se féliciter que malgré le refus depuis 2006 d’installer les nouvelles provinces conformément aux prescrits de la Constitution, malgré les hésitations et les manipulations pour empêcher la désignation démocratique des gouverneurs et le fonctionnement harmonieux des Assemblées provinciales, finalement l’architecture politico-administrative prévue par la Constitution pourrait se mettre en place. Mais au-delà de ces principes, sur le plan pratique, tout reste à faire notamment le régionalisme constitutionnel, le respect des prérogatives des institutions provinciales et l’utilisation rationnelle des ressources. Il ya manifestement une volonté politique du pouvoir de Kinshasa de caporaliser les provinces, de vider toute la démocratie locale de sa substance en imposant pratiquement des agents locaux pseudo-élus chargés plus d’exécuter des missions politiciennes que d’assurer le développement de la base. En définitive, nous croyons que nous sommes encore loin de la vision rationnelle attendue par le peuple congolais.

 

Avez-vous une conscience tranquille pour n’avoir pas retenu votre candidature par la CENI?

Ma conscience est tranquille. En voulant assurer la gouvernance de la Tshuapa, c’était pour nous un sacerdoce au service de ma communauté. La Tshuapa est la province qui a le taux le plus élevé de la pauvreté de toute la République alors que nous avons énormément des potentialités. Aujourd’hui, la Tshuapa est sinistrée malgré ses énormes potentialités. Recourir de manière malveillante et incompétente à un serment en instrumentalisant la CENI et la justice pour écarter notre candidature rentre dans un schéma général dont la finalité était d’éliminer toute la concurrence, d’instaurer un monolithisme de fait avec des candidatures uniques dans ce que tout le monde vient d’appeler un simulacre d’élection dès lors qu’il y’avait pas de choix sauf quelques exceptions.

 

Est-ce que l’élection des gouverneurs est une garantie pour l’organisation de la suite des scrutins dans les délais constitutionnels ?

L’organisation de ces scrutins trois mois après l’installation des commissaires spéciaux transformés eh candidats gouverneurs, n’entre pas dans un schéma rationnel et durable d’un processus électoral respectueux de la Constitution. Bien au contraire, c’est une tentative de distraction de la communauté nationale et internationale qui insiste sur l’impératif de faire cesser la léthargie volontaire de la CENI et son asphyxie planifiée par le pouvoir. Pour la Majorité, la perspective de l’alternance représente une eschatologie qu’il faut repousser éternellement, un moment à éviter à tout prix même s’il faut « tuer » la Constitution actuelle. Mais hélas, il n’y a pas encore de bombe ou des stratagèmes susceptibles de détourner un peuple de son destin celui de bâtir au cœur de l’Afrique, un Etat de Droit et une véritable démocratie.

 

La CENI paraît incapable d’organiser les échéances électorales dans les délais constitutionnels faute de moyens financiers. Qu’en pensez-vous?

Il n’a que Nangaa et ceux qui le manipulent de manière maladroite qui peuvent croire en ces balivernes. Si nous prenons notre Constitution à l’article 76, il est dit : « En cas de vacance ou lorsqu’il y a empêchement, on doit organiser les élections présidentielles 60 jours au moins et 90 au plus après l’ouverture de la vacance. Et e cas de force de majeur, ce délai peut-être prolongé à 120 jours au plus par la Cour Constitutionnelle ». Il faut alors être un pion sans conscience pour raconter qu’il faut seize mois pour avoir un fichier en gaspillant inutilement plus de six mois pour soit disant faire un appel d’offres international. Et pourtant nous avons au moins 270 jours....

 

A ce jour, le MLC s’est vidé de tous ses ténors éloquents. Ne Craignez-vous pas que votre parti ne ressemble à une coquille vide sans lendemain?

Non. Le MLC, c’est une idée. C’est un projet. Les hommes passent, les secrétaires généraux peuvent passer, le président peut-être empêché mais l’idée et l’idéal MLC continueront. C’est un défi pour le leadership actuel, celui dé donner à notre base des éléments de cette espérance. Nous en avons les capacités. Bien plus, l’idée MLC survit auprès de ceux qui ont été nourri à l’école MLC et qui abattent aujourd’hui un travail pour la libération du Congo, à l’exemple de Delly Sessanga, Olivier Kamitatu, José Endundo, Jean-Lucien Bussa.

 

Revenons à l’affaire Jean-Pierre Bemba. Y a-t-il des dessous des cartes?

Nous avons toujours dit que l’affaire Bemba est une affaire politique car, dans cette affaire, dite centrafricaine, il n’y a aucun centrafricain à la barre à la CPI. Dans cette affaire de responsabilité du chef hiérarchique pour crimes commis par ses hommes, il n’y a aucun élément du MLC qui est devant la barre. Cette affaire a été boutiquée, amplifiée à partir de la RDC et nous connaissons le modus operandi et les acteurs et à l’extérieur. Mais, la vérité finira par triompher et justice finira par être faite à Jean-Pierre Bemba.

 

La fin du mandat de Joseph Kabila se profile à l’horizon. Sans dialogue politique national, avez- vous une autre alternative pour décrisper la situation?

Il n’y a pas d’alternative au respect de la Constitution. Dans un Etat de droit constitutionnel, il faut recourir au texte constitutionnel. Lisez les articles 70 et suivant l’article 220, tout est écrit. Que chacun intériorise et respecte la Constitution au lieu de chercher des contorsions, de tordre le cou du texte, de chercher de recourir à des mécanismes méta-juridiques qui ne peuvent que créer des conditions d’instabilité d’insécurité, de personnalisation du pouvoir, causes des crises politiques récurrentes en Afrique et dans notre histoire politique.

 

Vous avez salué l’inscription de la loi Mutinga à la session ordinaire de mars. Quel est le bien- fondé de cette loi?

Si nous disons que la session actuelle est une session politique, c’est la dernière session avant la convocation du corps électoral prévu en septembre pour l’élection présidentielle. C’est la lettre de l’article 73 de la Constitution. L’actuel président ayant fait deux mandats, il est donc exclu qu’il puisse concourir à cette élection, conformément à l’article 220 de la Constitution, lisera certes un sénateur à vie. Mais le règlement intérieur du Sénat, texte à caractère ponctuel et spécifique à chaque législature, ne règle pas le statut du sénateur à vie. Notre collègue et nous tous, croyons qu’il faut accorder un statut particulier à ces dignes fils qui se sont sacrifiés pour conduire une nation aussi complexe que la RDC. Voilà pourquoi, en nous inspirant des modèles américains, voire français, il est important d’accorder à cet homme des droits particuliers en termes d’indemnités, de sécurité, de protocole, etc. Nous croyons qu’en votant cette loi pendant cette session, nous aurons vidé les inquiétudes des uns et la volonté des autres de contourner la Constitution peur continuer à exister mais surtout d’utiliser le chef de l’Etat comme leur instrument afin de sauvegarder leurs pulsions et boulimie du pouvoir. En définitive, l’adoption de cette loi et quelques autres notamment celles que nous avons initiées sur la ratification de la charte africaine de la démocratie, des élections et de la bonne gouvernance suffisent pour jeter la base de la paix dans notre pays. Ce qui permettra au gouvernement de libérer la CENI et à la Majorité de se choisir un candidat successeur du président KABILA.

 

La MP a raflé tous les postes des gouverneurs dans le fief du MLC qu’est la province de l’Equateur démembrée. Comment entrevoyez-vous l’avenir du parti cher au chairmain aux présidentielle et législatives ?

Il faut faire attention aux illusions en politique. Sur l’ensemble du pays et notamment à l’Equateur où il y cinq provinces démembrées, la majorité ne contrôle rien du tout. Dans la Tshuapa, le MLC a été empêché de présenter son candidat qui avait toutes les chances d’être élu. Dans la nouvelle province de l’Equateur, les députés du MLC ont fait le choix d’empêcher le candidat de la MP d’être élu malgré la présence des envoyés du pouvoir au plus haut niveau et des moyens conséquents. Dans la Mongala, le candidat du MLC a été élu gouverneur. Dnns le Nord-Ubangi, le candidat MLC, malgré l’asymétrie des Moyens, a imposé un second tour au candidat de la Majorité qui n’a pu être élu’ qu’avec un avantage d’une voix au second tour. Dans le Sud-ubangi, c’est un membre de la dynamique de l’opposition, ancien du MLC qui a été élu. Bien plus, il faut signaler que les bureaux définitifs des Assemblées provinciales sont contrôlés majoritairement par les députés MLC. Tous ces éléments démontrent la profondeur de l’ancrage du MLC dans son fief naturel mais notre ambition est nationale. Les différentes fragilisations et surtout la gestion anesthésiante de l’ancienne équipe ne nous ont pas permis de dynamiser les groupes provinciaux du MLC sur toute la République. C’est le travail que nous faisons aujourd’hui avec le groupe MLC dans le Bandundu ; dans la Province orientale, dans l’espace Kasaï et même dans le Katanga. Vous pouvez donc compter avec le MLC pour le devenir du Congo.

 

Propos recueillis par F.K. ET M.M.

 

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